Tu tournes en rond dans ton salon, et tu te fais un sang d'encre.
Tu te ronges l'ongle du pouce, une vilaine habitude que Mère n'avait jamais réussi à te faire perdre, concentrée sur le bruit de tes talons qui claquaient sur le plancher sombre, comme le rythme entêtant d'un métronome pour te guider, pour te recentrer. Sur l'essentiel, sur le rendez-vous à venir, c'était important pour que tu ne partes pas en vrille. Le son pour t'encrer à la réalité, toujours. Le violon de Priam. Pense au violon de Priam. A l'horloge de la boutique. Aux fredonnements de Vanille, dont elle ne se rend même pas compte. Au rire de Jade. Pense à eux. C'est pour eux que tu t'inquiètes.
Tu as appelé Ruvik et Spica, presque en panique, réussissant à utiliser ton Nokia 3310 par on ne sait encore quel miracle. Après avoir parlé à Vanille.
Après la rencontre. La rencontre de qui ?
Qui était-elle ?
Tu ne savais pas, de base, et là tu sais encore moins. Sa Mère. Celle de la forêt.
territoriale
Es-tu sur son territoire, Bérangère ?
Viendrait-elle reprendre de force ce qui lui était dû ?
Viendrait-elle t'arracher Vanille ?
Ta famille ?
es-tu en danger, bérangère ?
On toque à la porte, et tu sais que c'est Ruvik, tu le sens au fond de toi, le lien s'éveille et s'impatiente, et avec lui le soulagement. Tu ouvres la porte et tu ne lui laisses pas même le temps de te saluer.Ruvik, Spica. Il se peut que... Tu hésites, Bérangère ? J'ai peut-être fait une connerie. Personne ne t'avait entendu jurer avant. C'est signe d'une tempête dans ton esprit, rien de moins. J'ai peur qu'on soit en danger.
♡
Tendres baisers,
Bérangère Gardin de Boisdulier