putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain putain.

c'est tout ce à quoi pense Winchester Nova, qui n'a pas quitté sa chambre depuis... c'est tout ce à quoi il pense. il s'est déjà enivré des pires insultes jusqu'à les vomir, alors il ne lui reste plus que ça. lui, le plafond, et sa peau qui fourmille, qui l'irrite et le démange. sa peau abimée, deux fois marquée par les crocs d'un autre, au même endroit, même pas le même, est-ce mieux ou pire ? sa peau le gratte,
sa peau ne lui appartient plus.

ses pensées tournent en rond, alors il tente de les noyer. la bouteille qu'ils ont partagée, il l'a vidée sans y toucher. il en a trouvé une autre, bue lentement en fixant les bulles du le papier peint mal posé sur les murs. il a à peine bougé depuis... ça n'est pas sale, chez lui, juste poussiéreux. il a mal dormi sur le canapé, face au mur, pour ne pas voir le lit et les draps défaits,
chez lui, ça ne lui appartient plus.

et puis il gratte, gratte, gratte, gratte, sur les bleus et les morsures, jusqu'à avoir mal, jusqu'à avoir du mal à continuer, jusqu'à entendre ses dents grincer quand il serre ses mâchoires. il ne s'arrête pas, c'est ça, qu'il veut. il ne mérite que ça, cette douleur, il n'y a que ça dont il est sûr. c'est tout ce qu'il devrait ressentir. tout ce dont il a le droit. et la souffrance ne ment pas, ne peut pas le corrompre, ne peut pas le salir. pourtant il sait que ███████ ███████ la ressent aussi, quelque part, ailleurs, le plus loin possible de lui,
sa douleur ne lui appartient même plus.

(à un moment, il tient son téléphone, tapote,
et puis il n'y pense plus et l'abandonne sur la table basse)

on cogne à la porte, et d'un coup il n'est plus seul,
il ne sait pas s'il devrait s'en réjouir ou regretter. il n'y pense pas, étourdi par le flot de haine noyé dans quelques verres à peine, juste assez pour que tout bourdonne. il se relève pour aller ouvrir. les murs bougent un peu plus que prévu, mais il y arrive. un peu plus lentement que d'habitude, pour retarder l'inévitable.

Richard Breckenridge.
il est là, quand il ouvre la porte.
il est venu. il est vraiment venu.

ça fait sourire un instant Winchester Nova, il n'aurait jamais pensé lui dire de venir un jour. (il n'aurait jamais pensé faire venir quiconque ici) il ne sait pas quoi dire. il ne pensait pas qu'il serait là, même s'il l'a demandé. la main droite fermement serrée autour de la poignée, il s'appuie un peu contre la porte entrouverte.

machinalement, il gratte une dernière fois sa plaie, le temps de chercher ses mots. du sang sous les ongles, du sang dans son cou, sous le tissu, là où les dents se rejoignent comme pour s'embrasser sur sa peau à LUI. encore une fois, il gratte, la dernière fois (promis) allez, il faut parler, maintenant. ah, je... il se retient de céder une fois de plus. ça s'est rouvert, j'arrive pas à... m'arrêter y nettoyer.

(le miroir est brisé depuis longtemps dans la salle de bain.)

Richard Breckenridge.

il est là, et il est lui. tout de suite, il grogne, brusquement, donne des ordres, et n'a pas l'air ravi d'être là. c'est ce que ressent Winchester Nova, et il se serait peut être recroquevillé sur lui même par réflexe, s'il n'était pas anesthésié par l'alcool. à la place, il se demande simplement pourquoi il est venu, s'il n'en avait pas envie. il a à peine réfléchi au message qu'il avait envoyé, n'avait pas signalé que c'était urgent... Breckenridge aurait pu l'ignorer.

mais il est là, et il attrape son poignet un peu trop fort. s'il espère provoquer une réaction, tant pis pour lui, Winchester Nova ne montre rien, pas un signe de douleur, après tout ça n'est rien comparé au reste, au contraire, c'est une preuve de plus qu'il existe. qu'il est un individu à part entière, qu'il ressent quelque chose qui n'est rien que pour lui. (si seulement) ça le réconforte.

et puis, ça veut dire qu'il n'a plus à réfléchir. c'est Richard qui décide qu'il doit se tenir là, qu'il doit tourner la tête de cette façon pour qu'il puisse voir l'étendue des dégâts, c'est lui qui décide qu'il doit se déshabiller et se doucher. c'est reposant, de ne pas avoir à penser. tout ça, ça n'est plus de sa responsabilité. il est juste le mec pathétique et blessé. il se défend mollement, par simple souci des apparences, et pour ne pas admettre immédiatement que l'autre a raison de s'inquiéter. selon lui, ça n'est pas si grave que ça. c'est bon, c'est bon... ce n'est rien, quoi, quelques bleus, quelques griffures... mais il s'exécute.

le Sous-Lieutenant Nova se secoue pour libérer sa main coupable et emprisonnée, et se dirige vers la petite salle de bain, laissant sur sa trace le reste de ses vêtements. il pense entendre l'agacement de Breckenridge, ou la colère ? pour se faire pardonner ou pour se repentir, le jet d'eau est glacé quand il entre dans la douche, et il ne daigne pas tourner le robinet pour se réchauffer. sa peau brûlante frissonne immédiatement, mais il se contente de s'appuyer contre le mur qui lui fait face pour ne pas perdre l'équilibre.

(tout ça, tu l'as bien mérité)

les yeux fixés sur le siphon, il regarde l'eau rouge s'écouler, sans en penser grand chose. il fixe juste le tourbillon, qui devient vite transparent, les plaies sur son torse n'étaient que superficielles. il laisse l'eau couler, immobile. en soupirant, il bouge un peu, laisse l'eau couler sur son épaule et son cou, et feule immédiatement de douleur,
c'est plus fort que lui,
la brûlure est trop vive,
la blessure trop fraîche,
trop haïe,
il rit jaune.
(tout ça, tu l'as bien mérité)

mais il n'est pas tout seul. il ne devrait pas se laisser aller. il devrait montrer que ça va, que ça n'est pas si grave. le reste je peux le faire, c'est juste le cou, je vois rien... c'est vrai. il ne l'avait pas appeler pour se faire reluquer, il n'a pas envie qu'il apprenne tout sur lui en quelques regards et qu'il réalise à quel point il n'est qu'une ordure qui aurait du rester pourrir là où on l'avait trouvé. (pas encore, pas avec Breckenridge)

pourquoi est-ce qu'il lui a demandé de venir, alors ? et pourquoi est-il venu aussi vite, pourquoi est-il venu tout court ?

Winchester Nova était seul, chez lui. il aurait du apprécier ? il aurait du s'en réjouir ? pourtant il avait besoin de quelque chose (de quoi?) quelque chose qui lui manquait,
et il n'avait que trois numéros enregistrés dans ses contacts.

il sort enfin de la douche, ça n'a pas duré très longtemps. trempé, mais il ne veut pas s'essuyer, il ne veut pas salir les serviettes blanches du motel. alors il reste là, dégoulinant, sur le tapis de la salle de bain. l'eau glacée a chassé les vertiges de l'alcool. il fixe son invité, ses yeux noirs un peu vides.

(tu n'aurais pas du venir, je vais croire que tu viendras toujours maintenant)

pourquoi a-t-il eu besoin qu'il vienne ? pour l'enfoncer encore plus bas sous terre ? pour se faire humilier ? pour se faire remettre à sa place ? juste pas envie que ça s'infecte. (menteur)

Winchester Nova se sent souvent vulnérable, mais jamais comme ça, jamais en face de quelqu'un. surtout pas... pourtant, il n'a pas la nausée. il n'a pas envie de fuir. il repense à sa tête collée contre le torse de Richard Breckenridge, à son cœur qui bat contre son oreille, à ses bras autour de sa taille, une seconde de trop.
il se détend un peu.

il ne compte pas vraiment bouger, il attend juste sagement, et se laisse faire quand il faut lever ses bras, se faire sécher, et s'asseoir pour se faire soigner. c'est tout ce qu'il peut offrir, cette docilité usée. au moindre geste de l'autre, ses muscles se contractent, il s'attend à avoir mal, il s'attend à ce que sa peau soit presque raclée par la serviette, à ce que le désinfectant soit méchamment frotté sur ses plaies, il s'attend à devoir grogner pour contenir du mieux qu'il peut sa souffrance, (il s'attend à sa punition bien méritée), mais tout est délicat, autant que cela puisse l'être, du moins.

alors il n'ose pas parler non plus. comme il n'est pas sûr de mériter ce traitement là, il préfère ne pas le souligner, de peur que Breckenridge se reprenne et se rattrape au centuple en se rappelant que c'est bien lui, Winchester Nova. il écoute le silence grésillant de l'ampoule et des gouttes d'eau qui s'échappent du pommeau de la douche.

il voudrait lui dire qu'il allait vraiment le faire, qu'il comptait vraiment s'occuper de lui, comme il lui a assuré sous la douche. oh, vraiment ? est-ce que tu es sûr de toi, Winchester Nova, car j'ai un léger doute ? ne mentons pas, il comptait simplement aller se coucher sur le canapé et dormir, s'il n'avait pas soudainement vu autant de sang, s'il n'avait pas continué son supplice une minute de trop. donc il ne dit rien pour ne pas mentir.

heureusement, il sait répondre à la prochaine question. il ne sait pas exactement pourquoi, mais il ne peut réprimer un sourire. c'est celle là qui t'intéresse ? dieu merci, il ne parle que de celle là. c'est celle que Winchester Nova hait le plus et aime le plus. celle qu'il regrette le moins. alors il répond simplement, sans hésiter, toujours une esquisse de sourire accrochée à ses lèvres, c'est Garance Giesler qui m'a mordu.

il penche un peu la tête sur le côté, tu le connais bien, non ? c'est un raccourci un peu rapide, une supposition, mais il imagine mal l'Autre confier la prunelle de ses yeux, ce chien stupide, à quelqu'un à qui il ne fait pas confiance. ça l'amuse presque, finalement, que les crocs des deux se rejoignent dans sa chair, car ce sont les seuls dont il réclame accueille la violence.

il ne voudra pas l'admettre, il continuera de se dire que c'est simplement cette coïncidence qui le fait sourire et qui apaise sa peau en feu, mais il se sent bien, avec Richard Breckenridge. un peu trop, et s'il pouvait penser clairement il prendrait sûrement peur. peut être qu'il le fera, plus tard, mais il n'en a pas la force ni l'envie pour l'instant. il est juste content de l'avoir contacté.

il est content qu'il soit venu.
il est content qu'il ne lui fasse pas payer ses faiblesses.
il est content qu'il ne le haïsse pas tout à fait, même en voyant qui il est.
il est content qu'il soit venu et resté.

pour tout ça, il ne veut pas faire de peine à Richard Breckenridge, alors il tente de le rassurer. tu auras bien des occasions d'en faire d'autres. c'est une promesse.

( ne t'inquiètes pas, je ferai tout pour que tu en ai d'autres, des occasions,
je ferai tout pour que tu continues de me faire du mal,
pour être sûr de te garder près de moi,
je te le promet. )

Winchester Nova reste docile devant la colère de Richard Breckenridge.

il n'est pas visé, il n'a rien à craindre. il se demande simplement ce qu'il y a précisément, entre les deux hommes. ils se connaissent bien, mais quoi, ils se détestent ? Richard a l'air vraiment agacé par quelque chose, mais il n'arrive pas à savoir quoi et ne veut pas demander.
mais il ne le regarde pas avec dégoût. il ne le frappe pas. il ne le chasse pas. il ne le déshérite pas. il a compris, c'est évident, mais il ne lui reproche rien. il ne s'éloigne pas.

est-ce que... ce n'est pas grave ? si c'est immonde c'est répugnant c'est horrible. peut être pas.

peut être pas. il se sent mal, là, mais il ne sentait pas mal dans les bras de Giesler, il ne se sent pas mal quand Breckenridge le soigne sans injure. pourtant, il sait qui décide ce qui est bien et mal, et ce n'est pas lui. il n'a pas le droit de changer les règles, et puis, c'est trop tard pour le faire. (pourquoi continuer de s'y plier, si Lui n'est plus là pour surveiller ?)

c'est la deuxième fois que Winchester Nova se fait soigner par Richard Breckenridge, mais cette fois il est bien conscient et éveillé. il ne pense pas être assez fatigué pour dormir tout de suite. il devrait le laisser partir, il a fait tout ce qu'il fallait, il en a fait plus, même, trop. il devrait partir, mais Winchester Nova n'a pas envie qu'il parte. il en veut à Breckenridge d'être venu si vite, de lui faire croire qu'il restera.

reste, alors. les mots sortent tout seul, il est lui même surpris. il n'y a plus de sourire, plus rien, sauf une étincelle qui s'est brièvement allumée au fond de ses yeux. sinon, je vais le faire. c'est une menace ? peut être. ou peut être juste qu'il ne se sent pas capable de se retenir, s'il n'y a personne pour lui faire les gros yeux et l'engueuler, pour l'instant. ce n'est pas raisonnable, comme demande, mais il la fait quand même, parce qu'il peut. parce qu'il veut.

s'il a le droit de vouloir ce qu'il veut,
il se donne le droit de réclamer.

il veut quelqu'un, non, pas quelqu'un, il veut Richard, il veut sa présence, il veut lui parler. ça t'arrive de... ses yeux se baissent. nan. si, tu devrais demander.

mais il ne le fait pas.

ça t'arrive d'avoir envie de continuer de te faire du mal alors que tu ne devrais pas ça t'arrive même juste de devoir te faire du mal est-ce que parfois tu penses que tu le mérites ou que tu devrais te punir car il n'y a plus personne pour le faire à part toi plus personne pour vraiment te détester à part toi alors tu dois continuer de le faire tu n'as pas le droit de t'arrêter tu n'as pas le droit d'aller bien tant que tu ne l'as pas mérité

( est-ce que je le mérite, là ? est-ce que j'ai mérité de m'arrêter, est-ce que je mérite que tu restes ? )

Winchester Nova hoche la tête le plus sincèrement du monde en fixant Richard Breckenridge quand ce dernier lui demande s'il veut vraiment qu'il reste.

est-ce que ça n'était pas évident ? qu'est-ce qu'il lui faut de plus ? le Sous-Lieutenant Nova ne sait pas vraiment réclamer, alors il a fait de son mieux, mais ne pourrait pas se surpasser. heureusement, le message passe. il n'aurait pas osé répéter une seconde fois. rassuré, il se dit que ce n'est pas un mauvais moment pour sortir de la salle de bain.

il agrippe le bras de Breckenridge de toute ses forces, pas celui qu'il a planté, l'autre, et se relève. pendant une seconde, il reste là, debout, un peu trop proche, la peau encore presque humide et la paume brûlante. il se force à reculer d'un pas, jette la serviette nouée autour de sa taille par terre, et se dirige vers la petite armoire à côté du lit.

en chemin, il expédie sous le lit ses vêtements sale d'un coup de pied. Richard Breckenridge a si bien travaillé sur son torse, il ne voudrait pas gâcher tout ça en remettant un t-shirt sale et tâché de sang. heureusement qu'il lui reste quelques affaires propres. sous toute cette illusion de fausse pudeur, il cherche surtout à gagner du temps. il ne sait pas s'il devrait vraiment dire ce qu'il pense. il ne sait pas s'il sera compris. il s'est souvent dit qu'ils étaient les mêmes, qu'aucun ne valait mieux que l'autre, mais...

sur ce point, Winchester Nova s'imagine bien inférieur.

pourtant, il cède à la pression du silence, et se retourne pour fixer à nouveau son invité. il a encore quelques hésitations, qui ne parviennent à retenir le fond de sa pensée, qui sort sans aucun filtre. tu t'es déjà demandé ce que ça fait, de se tirer une balle ? il se reprend immédiatement, pour être sûr d'être bien compris. je veux pas le faire, hein.

oh, il ne le fera jamais, non, jamais. il sait très bien quoi penser de ces actes là, on lui a expliqué bien vite : c'est lâche. c'est honteux. ce n'est pas digne d'un vrai Homme. il ne le fera jamais, mais ça ne l'empêche pas de se demander ce que ça fait. il se demande si c'est vraiment le repos éternel que l'on promet, si toutes ses pensées se tairont vraiment pour de bon. si quelque chose l'attend, après. est-ce que tout ça aussi, c'est un mensonge comme le reste ?

il refait quelques pas vers la salle de bain pour éteindre l'ampoule bruyante, et attend docilement une réponse, l'air pensif.

juste comme ça.

Richard Breckenridge est pareil ?
Richard Breckenridge est pareil.
Richard Breckenridge est pareil.

Winchester Nova doute. pourtant, il écoute. il fait de son mieux pour ne rien rater, pas un seul mot, tant il est étonné. il regarde curieusement les lignes blanches tracées dans la peau qui s'offrent à ses yeux sans pudeur. il n'arrive pas à y croire, mais la preuve est sous ses yeux, alors il ne dit rien. il pensait que ce n'était que lui. qu'il était seul.
qu'il n'était qu'un faible.
que c'était de sa faute à lui.

mais il lui dit que ça passera, et il est plus vieux, alors on a envie d'y croire. il décide d'y croire, au moins un peu. mais pour combien de temps en a-t-il encore ? des années ? une décennie ? il n'a pas tout ce temps devant lui.

Richard Breckenridge s'approche encore. il parle, et Winchester Nova l'écoute. sans demander son avis, il reprend le bras qu'il lui a tendu, le regarde de plus près. il est intrigué par les cicatrices. il les fixe, sans rien dire, sans oser les toucher. quand il relève la tête, il sourit, et tend son avant-bras gauche, sans lâcher le bras qu'il tient, comme pour comparer. il lui montre les points à relier, ces brûlures qui ont par un heureux hasard la même taille que le bout incandescent d'une cigarette. certaines sont griffées superficiellement. c'est con, moi j'ai déjà plus de place, quelle blague horrible, mais c'est la seule manière pour lui de dire qu'il a vu. qu'il a compris. qu'ils partagent peut être plus qu'il ne l'aurait imaginé. il garde le sourire en reposant son bras le long du corps. son autre main serre encore le poignet de Breckenridge, il ne lâche pas son bras.

mais est-ce que ça te fait peur, d'y penser ? ça fait pas peur, il finit par répondre. il n'a pas peur de la Mort, tout l'a préparé pour ça. il s'est demandé s'il l'avait vexée, quand l'armée a été dissoute. et puis, Lysandre Hydra lui a offert ce qu'il voulait. a mis en danger ses jours. c'est tout ce qu'il voulait. grâce à ça, il n'a plus autant besoin de penser au goût du canon entre ses dents. il ne lâche pas son bras.

des fois, il se disait qu'il valait mieux qu'il parte de ses propres mains que de celles d'un autre. maintenant... est-ce toujours vrai ? non, non, il connait déjà la réponse, il y a des noms qui viennent, des noms auxquels il refuse de penser maintenant. il ne veut pas sombrer une deuxième fois en essayant de fuir la réalité de ce qui s'emmêle dans son propre crâne, pas tout de suite, pas maintenant, pas devant Richard Breckenridge. il ne lâche pas son bras.

mon père voulait pas se voir vieillir et perdre ses moyens. ça le rendait dingue. moi, je m'en fous, j'en ai pas pour aussi longtemps que lui. il refuse de lâcher son bras. ses doigts se resserrent.

Richard Breckenridge est loin d'être bête, comparé à Winchester Nova.

c'est peut être pour ça qu'il le détestait aussi viscéralement, lors de leurs premiers contacts, simplement car il était persuadé que l'autre se croyait meilleur que lui. non, pire. il sentait au fond de lui que l'autre était meilleur que lui, et de lui. ça le faisait rager, de se dire qu'il serait toujours en dessous de tout le monde, surtout de connards pareils. pourtant, ce connard là partage les mêmes tares que lui. ils n'ont pas les mêmes stigmates, mais il y a la même douleur cachée derrière.
c'est rassurant. en même temps, c'est terrifiant de baisser sa garde juste un peu, quand on a appris que les coups viennent de partout, et parfois de ceux en qui on a le plus confiance, mais il sait que la bataille est interrompue pour un temps, avec Breckenridge. le temps qu'il retrouve ses crocs.

alors il continue de s'accrocher. et d'écouter ces mots qu'il avait besoin d'entendre, sans le savoir. ces choses auxquelles il n'aurait jamais pu penser, trop occupé à ramper la tête baissée dans la boue. ou des mots qu'il a pensé de nombreuses fois, mais n'a jamais osé dire à voix haute.

(à la veillée funéraire, ils étaient tous en uniforme, comme moi, avec des galons en plus aux épaules et des éloges plein la bouche, ça débordait. quelle chance j'ai eu, d'avoir un tuteur si exemplaire, quelle chance)

ce soir, Winchester Nova se laisse apprivoiser, la tête un peu penchée, le regard simplement curieux. il n'y a aucun compliments, dans ce qu'il entend, mais c'est exactement ce qu'il mérite. qu'on lui rappelle qu'il va crever la gueule ouverte dans un caniveau, et que le ciel étoilé sera déjà un trop beau linceul pour sa dépouille. tout ça, c'est vrai, c'est ce qui se passera. il ne peut pas l'admettre à voix haute, mais il hoche la tête, et se répètera sûrement ces mots plus tard, seul.

tu as encore envie que je te mordes, tu n'en as pas eu assez, c'est ça ? cette fois, c'est un vrai grand sourire satisfait qu'il offre à Breckenridge, agrémenté un petit geste de tête pour montrer qu'il a bien remarqué les traces qu'il a laissé sur sa peau, sur ses lèvres, et qu'il en est toujours très fie. mais derrière la provocation, il a enregistré tout ce qu'il lui a dit, et ça lui plait.

ils n'ont pas eu une belle vie, ils n'auront pas une belle fin. mais il se sent prêt à montrer les dents jusqu'au bout, à emporter tout ceux qu'il pourra avec lui. après tout, il l'a promis. je sais pas ce qui se dit sur ma gueule, mais je tiens toujours mes promesses. c'est vrai. il n'a pas besoin de ça pour décevoir, après tout. tout le reste est déjà bien suffisant.

promet moi que tu continueras de mordre aussi, hein ? il n'a pas sa main libre, alors il se contente d'un mouvement d'épaule. (pas envie de lâcher, pas envie d'être lâché) s'il savait ce que ce mot voulait dire, il se dirait que tout ça le réconforte.

Richard Breckenridge est la même sale ordure que lui,
et tout va bien dans le pire des mondes.