Invité
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Le pas est pressé.
Partir, se carapater. Aller crever loin des regards éhontés tandis que ta tension se défenestre sous tes veines asphyxiées. Les poumons lourds, tu prends de grandes bouffées d’asphalte grisé.
De ces soirs où tu aboies, où le tapage est vipérin.
Marre de ces nuits blanches à regarder les âmes esseulées se faire violenter, de venir ramasser les dommages collatéraux, les miettes d’un être blessé.
De ces soirs où les phalanges sont ensanglantées et les cordes vocales usées. Violenter le crépi et faire voler les képis, t’es le sauvageon dissimulé dans le corps d’un transi.
Marcher d’un pas acculé, bousculer.
Se cogner contre autre chose que le vide de cette cité bonne à s’enfoncer dans le marasme, ce marécage doré. Vous vous entrechoquez, la dureté te rappel à la réalité.
Et tu siffles contre ton corps replié, tes mains dans le gravier. La gravité t’as rappelé à elle et tu retiens toutes insultes qui pourraient venir aggraver ton cas d’aveugle éméché par la colère carmine.
« Fais chier. »
Entre tes dents serrées, tu relèves tes yeux opales, les clignes faiblement à la recherche de tes lunettes parties glisser sur le macadam. Se relever sans grâce ni arrières pensées, le choc a chassé un instant le mal qui te rongeait.
Accroupie, tu t’avances, domines la silhouette échouée.
« Je suis désolé. » Une canne à vos pieds, tes pupilles s’élancent jusqu’au ciel. De quoi nourrir ta culpabilité, comme si tu n’en avais pas assez. L’overdose, un concept inconnu du karma.
Une main sur son épaule, l’autre sur son avant bras, tu le soulèves.
« D’un côté… » Tu t’apprêtes à trouver une excuse, quelque chose qui vaille le coup d’être raconté. Mais les rues sont vides et baignées d’une manière claire par la pleine sélène. Alors tu te tais.
Tu ne continues pas de chercher des affres pour illustrer ta non-culpabilité. Et dans les traits que tu dévisages, tu reconnais quelqu’un.
Regard plissé qui se concentre sur le profil atypique, tu te rapproches pour capter les particularités, confirmer ton idée.
Sans gêne.
« Greaves ? C’est riche de te trouver ici. » Car durant quelques instants, son prénom t’échappe dans ta mémoire diluée.
Dans l’écume de vos jours passés, tu as pourtant retenu des détails incommensurables. Des odeurs, des sons, des paroles. Des situations digne du déjà-vu entremêlées à ce qui a été réellement vécu.
Alors pourquoi son prénom se refuse à toi ?
Tu dérives, regarde de nouveau la canne.
Buter dans l’évidence n’est pas ton fort.
Mais tu te perds encore et encore dans ce visage qui n’a de cesse de te rappeler, de dissocier le lieu, la personne.
Car des deux images que tu tiens de lui, un gouffre s’y invite.
Il réagit à peine quand on le projette sur le sol - ils étaient tous les deux en train d'errer en peine, ils ne sont pas vus, fin de l'histoire.
Il réalise, un peu tôt, que c'est ce très cher Minos qui l'a envoyé au sol. Il le reconnaît sans le reconnaître, perturbé par l'absence des traits enfantins - ça fait longtemps qu'ils ne se sont pas vus.
minos
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Riley.
Ça te reviens violemment, claque la flegme dont se nourrie ta mémoire gangrenée. Le son de sa voix t’as guidé, aidé à te rappeler des jours passés. Cet électrochoc entre vous, ça vous feriez presque oublié ce qu’il en a été. De cette drôle d’animosité, des regards parfois hostiles, des messes basses dans les couloirs.
Pour le moment, tu ne sais plus.
Le passé t’échappe en filaments sous le firmament.
« Ce que je fous là ? »
Le cogner t’as presque fait oublier. Comme une migraine entêtante, ça revient se coller à tes états d’âmes, t’imbiber dans toute ton âme. Cette colère tonitruante, cette envie de tout lâcher.
Un instant de regret se greffe sur tes traits tirés, un battement de cils qui en dit long sur tes humeurs malmenées.
« Et toi ? Tu joues à être pauvre ? »
Riley il est pas malheureux dans tes souvenirs. Il vit dans l’opulence, cette drôle de décadence. Il a pas de quoi se plaindre, il est comme béni. Et ça te titille.
Profondément.
Finalement, Minos ne lui répondra pas - ce sont des vieilles habitudes, visiblement. Ces vieilles habitudes-là ont la peau dure, peut-être plus dure que celle de Riley.
minos
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