l'hôpital
DATE : 14 novembre 2021.
Deux semaines. Deux semaines. Comment ont-elles pu passer si vite ? Pourquoi est-ce qu’il a mis autant de temps à trouver une solution, Niels ? Oh, la réponse elle est bien simple : avant aujourd’hui, la solution, il ne l’avait pas. Deux - putain - de semaines passées loin de tout. Loin du monde. Coupé de tout. Et le voilà qu’il refait surface, Niels. Maintenant qu’il le peut. Oh, il ne sait vraiment pas comment tout va se goupiller. Il ne sait même pas s’il parviendra à expliquer la moindre chose à quiconque. Il faudra bien, pourtant. Comment justifier une absence complète de deux semaines ? Et surtout, comment justifier auprès de sa famille, de ses proches, cette absence.
Du calme, Niels, c’est la fatigue, c’est le stress.
Évidemment. Bien plus simple de tout leur faire reposer dessus, hein. Qu’importe. Avant de faire quoique ce soit, il y a une personne qu’il doit voir, Niels. Et ça ne sera pas long. Pas long, mais il y a beaucoup à raconter. Et deux-trois trucs à extérioriser, aussi.
Ce qui tombe bien, parce que cette personne, c’est Graham.
Et qu’il sera bien plus facile de parler à Graham que de parler à n’importe qui d’autre, en fait. Parce qu’au moins, face à lui, Niels il n’a pas ce sentiment de culpabilité qui le bouffe de plus en plus à chaque pas qu’il fait.
Un soupir. Il sait qu’il ne doit pas s’arrêter, Niels. De toute façon, pour aller où, hein ? Alors, il avance, droit devant lui, la démarche sûre. Son attitude habituelle. Bien que la fatigue soit visible sur son visage à des kilomètres. Stress et angoisses lui tirent encore un peu les traits. Et c’est comme ça qu’il passe la porte de l’hôpital. S’il y a des gens qui attendent avant lui ? Niels, il n’en a rien à faire ; il se dirige droit vers l’accueil, et s’adresse à la première personne qu’il croise. Pas forcément de la manière la plus agréable, mais clairement, on a pas le temps pour être agréable.
14.11.2021
niels bjorntvedt
chasing down the stars ?
Deux semaines.
Deux semaines.
Deux semaines depuis… depuis.
Deux semaines depuis que Graham était sorti des égouts, en se demandant encore comment il était toujours vivant. Deux semaines depuis l’espèce dé déchirure, quelque part au niveau du coeur, deux semaines depuis que Graham s’en voulait mortellement, mortellement, mortellement.
Jamais il n’avait levé la moindre main sur qui que ce soit (sauf Lan, quand ils étaient petits, mais qui ne lève pas la main sur son frère, sincèrement ?), jamais il n’avait été partisan de la moindre violence, il la haïssait, la violence était au centre de son travail et il l’exécrait, alors pourquoi, pourquoi est-ce qu’il avait cédé avec une telle facilité ?
Pourquoi est-ce qu’il avait tiré avec une telle facilité ?
Il avait repris le travail, depuis, il avait fait semblant de rien, il avait repris le travail parce que ses collègues allaient se demander ce qu’il avait, à force, déjà qu’il s’absentait une semaine pour maladie soudaine, ça n’allait vraiment pas, alors Graham était là, fidèle au poste, faisant le tour de ses patients dans sa longue blouse blanche qu’il avait l’impression de ne plus mériter.
j’ai tiré sur quelqu’un qui ne me menaçait même pas, je suis quel genre d’être humain pour faire un truc comme ça ?
Il continuait son petit tour, sa petite routine, tout allait bien pour le moment, ils profitaient d’un peu de calme dans le département, à la bonne heure, quand son portable de service se mit à sonner.
On avait besoin de lui à l’accueil, un homme était là pour lui, c’était urgent, apparemment, coup d’oeil au couloir, bon. On n’avait pas besoin de lui pour le moment.
Il pouvait prendre quelques minutes pour aller trouver cet homme qui semblait avoir tant besoin de lui.
Il descendit, se dirigea vers l’accueil et croisa le regard de l’hôtesse qui lui désigna du menton l’homme qui lui faisait face.
Et Graham faillit bien ne pas le reconnaître.
Il s’approcha, stupéfait.
- … Bjorntvedt ?
Mais qu’est-ce qu’il s’était passé ? Pourquoi est-ce qu’il avait l’air aussi… aussi négligé ? Il ne lui avait pas semblé que cet homme était un tant soit peu capable de sortir de chez lui avant d’avoir ciré ses chaussures, alors qu’est-ce qu’il faisait aussi… débraillé serait le meilleur terme pour le décrire.
Qu’est-ce qu’il faisait là ?
Il ne s’était pas attendu à une carte postale après la Chasse, mais il n’avait pas la moindre nouvelle de lui depuis deux semaines (ni de quiconque d’ailleurs, à croire qu’il avait juste rêvé), et maintenant il était… là ?
- … Qu’est-ce qu’il se passe ?
l'hôpital
C’est que plus les minutes passent, plus il s’impatiente, Niels. Il hésite même un instant à aller attraper le combiné de l’accueil et appeler lui-même Graham. Mais avant qu’il ne mette cette idée à exécution, voilà qu’il entend une voix derrière lui.
Il attire Graham dans un couloir un peu moins fréquenté, avise les toilettes, et y entraîne Graham dedans. Un soupir, forcément, il fallait s’en douter, il y avait du monde dedans.
Bien maintenant, on peut passer à la phase de faire sortir tout le monde d’ici. Ce qu’il s’empresse de faire Niels. Et c’est qu’il n’hésite pas à bousculer certaines personnes, qu’importe leurs protestations. Il ne cherche même pas à donner une excuse. Personne, absolument personne, ne doit entendre ce qu’il se dirait entre Niels et Graham.
14.11.2021
niels bjorntvedt
chasing down the stars ?
Procyon était un mot que Graham n’avait pas hâte de réentendre. En vérité il aurait aimé ne plus jamais l’entendre, plus jamais, et il pensait qu’il en était débarrassé, assez naïvement, il pensait que la mort d’Hazel aurait suffit, deux semaines sans nouvelles de la part de personne l’avaient fait espérer, mais non, évidemment, bien sûr que non, ç’aurait été bien trop simple, et puis de toute façon il le savait, il le sentait, le Cercle 6 existait toujours, tout autant que l’acide lui brûlait toujours la gorge, de manière régulière.
C’est pour cette raison qu’il se laissa entraîner par Niels sans broncher, même s’il n’aimait guère être trimbalé comme ça, surtout quand le gars faisait tout son possible pour marquer son déplaisir toi non plus tu ne m’as pas manqué, sincèrement, mais il avait besoin de savoir.
Il avait besoin de comprendre.
je veux comprendre
Alors il se laissa tirer jusqu’aux toilettes, sous le regard très surpris de l’hôtesse d’accueil qui l’avait appelé, il croise son regard et se contente d’un haussement d’épaules, tout va bien, je connais cet illuminé, on doit causer mais très sincèrement, je sais pas si je suis très pressé d’entendre ce qu’il a de si urgent à me dire, et quand il lui lance des ordres, de son air énervé, Graham prend à peine la mouche et se contente d’obéir sans un mot.
Il tourne les talons et s’en va chercher chargeur et documents, et il trouve qu’il ne va pas assez vite, la nervosité de Niels lui colle à la peau et il court, il court dans les couloirs pour aller chercher le putain de chargeur et les foutus documents, les minutes sont bien trop longues mais il met la main sur tout ce dont il a besoin, et il dévale les escaliers quatre à quatre pour rejoindre Niels, qui avait fait place nette dans les toillettes.
- Procyon, lâcha-t-il, appuyé contre le chambranle, un peu hors d’haleine. Qu’est-ce que tu sais ? Qu’est-ce qu’il se passe ?!
et t’étais où pour ressortir tout débraillé comme ça ??
l'hôpital
Une fois Graham de retour, Niels s'empresse de refermer la porte, et de la verrouillé. Au moins comme ça, personne ne viendra les déranger.
Il laisse un instant la liste à Graham, le temps qu'il l'observe. Ou pas d'ailleurs. Si ça se trouve, il est effectivement au courant de qui sont les autres liés. Mais bon, Niels juge que Graham a sans doute besoin d'un court instant pour analyser ce qu'il vient de lui annoncer… et surtout, ne pas enchaîner directement avec la suite.
14.11.2021
niels bjorntvedt
chasing down the stars ?
Graham se laissa faire, toujours, parce qu’il sentait que Niels était nerveux, vraiment nerveux, et il savait qu’il ne l'aimait pas (et réciproque), et il préférait éviter de se prendre un nouveau coup de poing dans la mâchoire en posant une question de trop, en marquant son impatience. Alors il lui laissa le chargeur, et il s'attela à la rédaction de l’arrêt maladie, Ruben DeMayo, Ruben DeMayo, ce nom lui était familier sans l’être, qui était cet homme, et pourquoi avait-il besoin qu’il lui falsifie un certificat ? (Hippocrate s’en retrournait dans sa tombe, d’ailleurs, désolé Popo, il y a des choses bien plus grandes que toi et moi en jeu, c’est à l’échelle de l’univers, maintenant, et un serment ne fait pas le poids contre l’univers). Il le tendit à Niels qui le lui arracha (évidemment, il ne pouvait rien faire délicatement quand il s’agissait de lui, évidemment), et écarquilla les yeux en apprenant la nouvelle.
Un nouveau lié ?
le pauvre
Il attrapa le papier et en lu les noms, mais aucun ne lui disait quoi que ce soit. Ou peut-être que si ? Il n’arrivait pas à comprendre, il ne les connaissait pas en les connaissant tout de même, les noms ne lui étaient pas familiers mais la sensation, elle, l’était.
Étrange, et un peu désagréable. Sans l’être.
Extrêmement dérangeante situation, à laquelle il ne s’habituait pas.
Il était lié à ces personnes et elles étaient liées à lui, il ne connaissait rien d’elles et pourtant ils formaient une meute, on doit protéger Procyon.
- Je n’en connais aucun, désolé, répondit-il en mémorisant les noms, et en tendant la liste à Niels.
Il n’était pas au courant, il n’avait même jamais rencontré Hazel personnellement. Tout son savoir, présentement, reposait sur ce que Niels accepterait de lui dire.
Et en vue de son état, il en avait beaucoup sur les épaules.
Il grimaça en repensant à la mort d’Hazel. Il ressentait encore la douleur, parfois, en cauchemar. Plus jamais, plus jamais. Il le regarda avec attention, bu ses paroles, Procyon était toujours vivant, au moins c’était une confirmation, mais comment ça, différent ?
Il prit le papier qu’il lui tendait, enregistra ses informations, le glissa dans la poche de sa veste et prit une grande inspiration.
Ok.
Ça faisait beaucoup à digérer d’un coup.
moi qui pensais en avoir fini avec ça, on dirait qu’on est forcés à replonger dedans la tête la première
super.
je vais dire quoi à ma famille, moi ?
- Tu peux compter sur moi, répondit-il avec sincérité (mais de toute façon, avait-il vraiment le choix ?) Mais il faut que tu m’en dises un peu plus. S’il-te-plaît. Que je puisses m’arranger…
Il avait mille questions à lui poser, mais le plus simple serait de le laisser parler.
Sinon il allait s’énerver, il le sentait déjà, et la dernière chose dont il avait besoin, c’était d’un Niels énervé.
l'hôpital
Une fois l’arrêt de travail récupéré, et enfilé dans sa poche - qui sera à aller déposer au plus tard demain, d’ailleurs, c’est bon de se le rappeler - il fait une moue presque déçu, Niels, quand il apprend que les noms sont inconnus à Graham.
Il a ensuite enchaîné sur un très bref début d’explication. Laissé le temps à Graham d’analyser, réfléchir. Lui répondre aussi. Niels ne manque pas d’afficher un air fortement agacé - plus qu’il ne l’était encore - mais, il prend la peine de lui répondre.
Alors, Niels, il se rapproche de Graham, histoire que, même s’il sont seuls dans cette pièce, il n’y ait vraiment personne d’autres qu’eux qui soient dans la confidence. Niels, il vient même retenir Graham au col, histoire qu’il ne fasse pas un pas en arrière, par réflexe - après tout, la dernière fois qu’il se sont croisés, Niels lui a bien balancé son poing dans la figure, il est vraiment judicieux de penser que ça pourrait revenir à nouveau. Mais à partir de là, Niels, il lui dit tout, à Graham. Tout. Sans omettre un détail. Commencer par les égouts, enchaîner par lui, Procyon, l’homme aux cheveux blonds, les aboiements - oh, ça oui, les aboiements, les grognements, bon sang, comment ne pas y passer à côté… Tout jusqu’à aujourd’hui. Jusqu’à cette décision prise pas plus tard que le matin même. Soupir. Il relâche Graham.
Et puis, il s’éloigne, Niels. Il va sur son téléphone.
14.11.2021
niels bjorntvedt
chasing down the stars ?
Graham, les bras croisés, haussa un sourcil. C'est qu'il commençait à terriblement l'agacer, le Bjorntvedt, avec ses reproches mal placés. Il était patient, terriblement patient, mais un mot de travers et il sentait qu'il allait vite reprendre où ils l'avaient laissé dans les égouts, à savoir son propre poing sur sa tronche guindée, à l'expression ô combien emmerdante.
Graham avait très envie de lui mettre une bonne salade de phalanges dans la mâchoire. Mais pas tout de suite.
Même s'il commençait un peu à le mériter.
- Peut-être que toi tu es au dessus de tout ça, répondit-il d'un ton glaçant, mais moi j'ai une famille et des obligations, je peux pas juste me permettre de me casser sans rien dire. Alors, soit tu me laisses m'arranger comme je peux, soit tu peut bien aller te faire foutre, d'accord ? Bien.
Et quand il l'attrapa par le col, Graham se dit qu'il allait encore se prendre une patate. Oh, mais il en avait marre de se faire frapper, la situation n'était pas du tout ap-
Mais il se contenta de lui glisser un message. Ah. Ah bon. Ah bien.
Il l'écouta avec concentration, les yeux écarquillés. Ça faisait vraiment beaucoup d'un coup, tout ça.
- Bien sûr que tu peux compter sur moi, répondit-il, vaguement énervé. Est-ce que j'y suis attendu ? Si oui, est-ce que je peux y aller après mon service ?
il faut que je le voie.