bureau de Wren
DATE : 1 DÉCEMBRE.
S’il y a bien un groupe de mots qui représente bien sa vie actuelle, à Niels, c’est bien celui-ci : il s’agit là d’un gros bordel. Ah, clairement, depuis cette maudite nuit d’Halloween, plus rien ne semble aller droit dans sa vie. Mh. A dire vrai, ça remonte même à avant, ça remonte à ce vingt-et-un octobre, où Procyon a décidé de se lier à lui… Ah, quel enfer. Il n’arrive même plus à savoir où il doit donner de la tête, Niels. Ni même à savoir à qui, il doit donner de la tête. Cette impression constante de perdre pied, alors qu’il ne faut pas, qu’il ne peut pas, qu’il n’a pas le droit, Niels, que de flancher. Être perpétuellement sur les nerfs, cohabiter avec des angoisses qui ne le laissent jamais tranquille une seule seconde ; vouloir sans cesse être tenu au courant - et surtout vérifier par lui-même - que tout le monde aille bien. A-t’il un jour penser à déléguer, où encore à miser sur le fait de faire confiance à d’autres ? Non, évidemment que non. Jamais. Pas quand ça concerne de tels sujets. Et la dernière chose dont il a besoin, Niels, c’est de voir son nom apparaître dans un article. Et ça, ça a le don de le mettre en rogne. Et évidemment encore, le nom du journaliste ayant rédigé cet article ne lui est pas inconnu. Évidemment, cela aurait été trop beau sinon…
Alors, il n’a pas perdu de temps, Niels, à aller jusqu’aux bureaux de l’Octant. Il ne prend même pas la peine de s’adresser à l’accueil, il se souvient bien de l’endroit où il doit aller. Personne ne l’arrête, et probablement que personne n’a songé à chercher à l’arrêter ? Qu’importe, ça se serait mal passé si quelqu’un avait essayé de toute façon. Il entre sans même s’annoncer, Niels, dans ce misérable bureau. Misérable, le mot lui correspond bien, à l’image de la personne qui l’occupe. Enfin, les mots sont forts ; si le jour avait été autre, Niels n’aurait jamais eu une telle pensée, mais le jour n’est pas autre, et Niels est sur les nerfs - et énervé aussi, mais ça semble habituel chez l’homme.
(old fri)END(s)
Tu dois ralentir. Tu travailles trop. Tu en fais trop. Des mots, des phrases que Vladymire te répète sans cesse en ce moment. Des choses que tu n’as ni besoin, ni envie d’entendre. Source de dispute constante chez vous. Tu pars tôt le matin. Tu rentres tard le soir. Mais c’est important n’est-ce pas. Ça en vaut la peine non ? Le problème avec toi Wren, c’est que tu es persuadée qu’un rien est indice. Qu’un rien est intéressant. Que toutes les pistes doivent être suivies. Et en voulant être partout, tout le temps, tu n’es nul part et encore moins auprès de ta compagne. Tu ne remarques pas le mal que tu peux faire autour de toi. Le mal que tu laisses sur ton passage. Trop aveuglée par ton ambition.
Des murmures dans le bureau. Des regards que l’on te laisse. Et le nom Bjorntvedt qui t’arrive aux oreilles. S’accompagnant aux murmures, la silhouette de l’avocat qui passe la porte. Tu ne sais cacher ton sourire. Un sourire loin d’être aimable et bienveillant. Mesquin sans doute. Arrogant c’est sûr. « On laisse vraiment n’importe qui entrer dans ce bâtiment de nos jours. » Marmonnes-tu plus pour tes collègues qui sont en train de déguerpir que pour Niels. Signe de tête en guise de salutation parce que tu n’as pas été élevée chez les rats. « Monsieur Bjorntvedt. Vous ne me dérangez jamais voyons. » Sarcastique jusqu’au bout des ongles. Tu ne peux pas le piffrer. Tu sais qu’il se moque de ta réponse. Il te l’a dit lui même. Tu t’en fous. Qu’il ne pose pas de questions s’il ne veut pas de réponse. Oh comme tu es hypocrite.
Ta main se tend vers la chaise qui fait face à ton bureau. « Mais je vous en prie, installez-vous. Un thé et des petits biscuits avec ceci peut-être ? » Tu le sais, ça va brailler dans l’open-space. Vivement que tu aies une promotion et un véritable bureau. L’intimité n’existe vraiment pas ici. Une part de toi s’en moque, l’autre s’agace de donner un spectacle à toutes ces commères qui t’entourent. « Que me vaut le plaisir de votre visite Monsieur Bjorntvedt ? » Tes coudes sur la table et tes mains croisées. Ton menton qui repose sur celles-ci et ton regard qui s’accroche au sien. Ne pas céder pour ne pas paraître faible. Tu sais très bien pourquoi Niels est là. Ce que tu voudrais savoir maintenant, c’est pourquoi n’est-il pas venu plus tôt.