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Together Forever [ft. Graham]
Together Forever
C’est une matinée tranquille. C’est une matinée lambda. Normale. Ça devait l’être. Mais plus rien n’est normal. Plus rien n’est tranquille. Plus depuis que Graham est devenu un x-men. Plus depuis Halloween. L’ambiance est toujours pesante. Lourde. Si lourde que c’en est presque douloureux sur tes épaules. Tu craques petit à petit. Tu te brises. Tu ne sais plus supporter. Et là, la goutte d’eau. Tu remontes dans ta chambre pour récupérer les dossiers que tu as oubliés. « Tu arrives à croire que j’ai failli partir au travail sans ça ? » Lances-tu à Graham en pointant la pile de feuilles qui trône sur ta table de chevet, souriant bêtement. Coup d'œil à ta montre. Tu vas être en retard, c’est malin. Tu n’aimes pas être en retard. Tu ne l’es jamais d’habitude. « Tu pourras signer l’autorisation de sortie pour Margot ? Sa classe va visiter l’aquarium apparemment. Je vais être en retard sinon. » Sur tes lèvres une fausse moue déconfite. Un air dont tu as le secret. Celui-là que tu prends quand tu veux obtenir quelque chose. Et puis de toute façon, tu n’as vraiment pas le temps.
Tes talons claquent sur le sol alors que tu fais le tour du lit. « Est-ce que tu as demandé à Minuit s’il voulait venir pour Noël ? » Tu ne devrais pas poser la question. Tu devrais déjà être dans ta voiture. Pas à attendre une réponse de quelque chose que tu pourrais savoir ce soir. Il faut dire que chaque fois que tu n’entends pas Graham, chaque fois que tu ne le vois pas, il y a cette peur qui t’aspire. Cette peur qu’il ne soit de nouveau plus là. À vrai dire, tu ressens la même peur pour tous tes proches. Tes enfants. Minuit. Benjamin. Ton frère, ta soeur. Si tu n’es pas en mesure de les surveiller alors cela laisse le champ libre pour les étoiles. Comme si tu pouvais faire quoi que ce soit. Ta main frôle les dossiers, s’en saisit. Ils t’échappent. Une multitude de papiers s’envole alors. Plus que le nombre de feuilles que tu as normalement. Et plus tu essaies de les attraper, plus ça se multiplie. Encore. Et encore. Et encore. Rapidement, le sol est jonché d’un tas de feuilles blanches, vierges de toute encre. Quelque chose ne va pas. Tu crois savoir. Tu as peur de savoir. Ta gorge se serre. Pas ça. Par pitié, pas toi. Ton regard essaie de s’accrocher à celui de ton époux mais ta vision est bien vite entravée par des larmes de panique. « Chéri… » Tu inspires. Expires. Tu souffles pour te calmer, pour essayer de gérer cette situation ingérable. Tu te fais la plus immobile possible. « Ce n’était pas toi… n’est-ce pas ? » Demandes-tu en connaissant pertinemment la réponse. C’est un cauchemar.
Re: Together Forever [ft. Graham]
oh, mon amour…
- Pas vraiment, répond Graham en souriant, lissant le drap de lit du plat de la main. J’aurais dû venir te les apporter, quel dommage…
Satisfait par le lit enfin fait, il se redressa et jeta un coup d’oeil à sa femme qui terminait de se préparer. Elle était en retard, Tomoe avait piqué une petite colère qui les avait tous retardés, ça prenait du temps à consoler, une petite fille triste, et maintenant Fubuki courait, rassurée cependant que leur petite dernière soit calmée. Graham avait la chance de commencer un peu plus tard, il pouvait conduire les filles à l’école, mais Fubuki avait insisté pour rester tant que la petite n’avait pas totalement séché ses larmes.
Protéger, toujours, à chaque seconde. Il reconnaissait bien là son épouse ; il ne s’en vexait pas, il savait que ça n’avait pas de rapport avec sa façon de gérer l’éducation de leurs enfants, ils étaient sur la même longueur d’ondes à ce sujet, et à beaucoup d’autres également.
Fubuki le regarde avec cette expression dont elle avait le secret, celle qui le faisait craquer en moins d’une seconde, même depuis les vingt-huit ans qu’ils se connaissaient, depuis les vingt-huit ans qu’il l’aimait de tout son cœur.
Il n’avait jamais rien pu lui refuser, quand elle le regardait comme ça, et puis de toute façon, loin de lui l’envie de le faire.
- Oui bien sûr, ne t’en fais pas pour ça, je lui ai demandé de préparer son carnet, je le signe dès que j’ai fini ici.
Qu’est-ce qu’elle était belle, sa femme.
Est-ce qu’il était possible qu’elle soit plus belle un peu plus tous les jours ? Possible. En tout cas, Graham ne se lassait pas de la regarder, même quand elle courait pour récupérer ses dossiers.
Peut-être même encore plus depuis la Chasse.
depuis la mort
Depuis qu’il avait vraiment pris conscience que la vie ne tenait pas à grand chose, paradoxal, pour un médecin. Lui aussi n’était qu’un corps mortel.
Sa mère était à l’hôpital, sa condition était critique et il sentait que ça ne durerait plus longtemps. Il le savait, ça lui avait traversé le corps et s’était figé dans ses os, ça le couvrait comme une chape de plomb. Il avait besoin de l’amour de cette maison plus que jamais.
Il avait besoin de voir Fubuki plus que jamais.
Il mourait de ne pas pouvoir la toucher.
Il s’était réveillé en pleine nuit et s’était rendu compte qu’il l’entourait de ses bras, qu’il s’était lové contre elle dans son sommeil, et il avait reculé si rapidement, par peur de l’irréparable, par peur de lui faire le moindre mal, qu’il s’était cogné la tête contre le cadre du lit.
Tant de choses avaient changé dans sa vie depuis qu’il était lié à Procyon.
Il avait la chance que ça ne gâche pas son mariage. Beaucoup de chance.
- Bientôt hanni, on déjeune ensemble ce midi, je lui demanderai à ce moment là, mais je doute qu’il dise non, ajouta-t-il en écoutant d’une oreille distraite ses deux filles piailler dans la cuisine, elles finissaient le concours de celle qui boirait le plus vite son chocolat chaud à la paille, Tomoe gagnait, à en juger par les protestations de Margot, et il sourit ; elles étaient bien vite oubliées, les larmes. Tant mieux, la journée reprenait du meilleur pied.
Il avait hâte de voir Minuit ; il lui manquait à chaque seconde où il n’était pas avec lui. Il rêvait d’un monde où il se réveillerait tous les jours dans le même lit que ses deux amours, et revenait à la réalité avec un poids sur le cœur.
Alors il profitait de chaque instant, et il comptait bien que Noël en soit un. Il savait que les enfants ne poseraient pas de questions ; Minuit vivait pratiquement ici, pour les petits il faisait partie de la famille, même s’ils n’avaient pas la moindre idée d’à quel point.
Le bruit du dossier qui tombe lui fit bouger la tête avec curiosité, et ses sourcils se froncèrent légèrement quand les feuilles se mirent à voler dans la pièce.
Quelque chose n’était pas normal.
Il le devinait rien qu’à l’air de Fubuki. Il la connaissait par coeur, elle ne se tendait pas comme ça. Jamais. Son ventre se tordit d’une angoisse soudaine.
Pourquoi est-ce qu’elle avait les larmes aux yeux ?
Qu’est-ce qu’il se passait ?
- Mon amour … ? murmura-t-il d’incompréhension.
Il détestait la détresse dans ses yeux. Il détestait ses larmes.
Il se précipita vers elle, s'accroupit à sa hauteur et attrapa son visage entre ses mains, pas le temps de penser à ce qu’il pourrait arriver, Fubuki allait mal et ça suffisait à lui faire oublier tout le reste.
Il se fit aussi immobile qu’elle, deux statues figées, entourées de papier, un blanc perçant qui semblait se moquer d’eux.
- Non, non c’est pas moi… Ils connaissaient la réponse, bien sûr, ils savaient tous les deux que ce n’était pas Graham, c’était une évidence, et Graham refusa de comprendre.
Même si ça lui avait explosé dans le cerveau comme une sonnette d’alarme.
pas toi pitié pas toi aussi non je vous en supplie par ma femme pas ma femme pas fubuki pitié
Son ventre se tordit, il avait la nausée. Il refusa de laisser son regard se brouiller, pas cette fois. C'était à lui d'être fort.
- Comment est-ce que tu te sens … ?
C’était idiot, comme question. Mais il ne savait pas quoi dire d’autre. Pas de "ça va aller", pas de "on va trouver une solution", parce qu'il n'y avait aucune solution. Il ne pouvait rien faire contre ça, à part essayer de la protéger.
- Je suis avec toi, d'accord ? Je t'aime. On va s'en sortir.
Re: Together Forever [ft. Graham]
Together Forever
Ses mains sur tes joues qui t’arrachent un frisson. Quand était la dernière fois que la spontanéité du touché avait été permise dans votre couple ? Un mois et demi. Presque deux. Tu aurais pu juré que c’était il y a plus longtemps. Bien plus longtemps. Parce que Graham fait attention à tout. Parce qu’il a peur de te blesser. De blesser les enfants. De blesser Minuit. Et tu as peur toi aussi, évidemment. Mais il te manque. Il te manque tellement ton mari. Il est toujours là pourtant. Il est le même mais différent. Il a changé parce qu’il doit s’adapter. Avec toi, il est pareil qu’avant. Moins tactile. Presque plus aimant encore, si c’est vraiment possible.
Tes larmes, tu ne veux pas les relâcher. Tu ne veux pas qu’elles roulent et déboulent le long de joues. Le long de ses mains. Elles n’en ont que faire. Elles coulent sans que tu ne puisses maîtriser quoi que ce soit. Impuissante Ce n’est pas lui. Ce n’est pas lui donc c’est toi. Ce n’est pas son pouvoir alors c’est le tien. Tu es comme lui, n’est-ce pas ? Tu es une liée. « Je… Je ne sais pas. Ça va je crois ? » Malgré les palpitations. Malgré la tête qui va exploser. Ça va. Tu n’es pas plus nauséeuse que ça. Tu n’as pas le tourni. Tu ne fais pas de malaise. Tu es assommée par la nouvelle, par le choc, mais c’est tout. Ton front vient trouver son épaule. Tes bras entourent son dos. Et les larmes roulent. Et les sanglots éclatent. Tu as besoin de décompresser. De pleurer jusqu’à ce que tu n’en puisses plus. Tant pis si tu ruines ton maquillage. Tant pis si tu es faible. Tu as besoin de cette étape pour grandir. Pour devenir plus forte. Pour supporter cette énième épreuve. Tu as besoin de tout lâcher pour ne plus rien laisser paraître ensuite. Tu as surtout besoin de ses bras. Parce que dans les bras de Graham, tu es en sécurité. Contre lui tu ne risques rien. Si seulement c’était encore vrai.
Tu te détaches de son étreinte après quelques minutes. « Pardon… » Tu t’excuses, le mascara au milieu des joues. Tu t’excuses parce que pleurer ce n’est pas toi. Te laisser aller de la sorte, ça ne te ressemble pas. C’était la goutte d’eau de ton vase. C’était trop. « Je t’aime. » Sourire triste. Sourire sincère. Que ferais-tu sans lui ? Je t’aime mais non, on ne va pas s’en sortir. Tu sèches tes joues, nettoies le maquillage qui y a coulé avec tes mains. « Je dois le dire à Minuit… Et à Benjamin… » Rien que d’y penser, ça te tord le ventre. La nouvelle avait eu du mal à passer pour Graham. Elle est toujours en travers de ta gorge. Alors en rajouter une couche par dessus…Tu soupires. Un soupir long. Un soupir las. « Et… Je dois la trouver… » Mon étoile.
Re: Together Forever [ft. Graham]
oh, mon amour…
Elle lui promet que tout va bien et elle fond en larmes dans ses bras.
Graham la serra contre lui aussi fort qu’il le peut, contre son coeur qui battait à tout rompre, déstabilisé, désarmé par la détresse de sa femme. Fubuki ne pleurait presque jamais, depuis toujours, ce n’était tout simplement pas dans sa nature, les larmes c’était lui qui les laissait couler, dans leur relation ; de Minuit, elle et lui, c’était celui qui pleurait le plus, c’était le plus à fleur de peau, c’était comme ça, tous les trois fonctionnaient comme ça.
Fubuki qui sanglotait contre son épaule le troublait énormément, mais il comprenait. Il comprenait son besoin de lâcher la pression, d’évacuer le stress, celui qui s’empilait depuis quelques mois, depuis son propre éveil, depuis la chasse
depuis la mort
il appuie sa joue contre la tête de sa femme, et il la serre aussi fort qu’il le peut, il doit être là pour elle, aujourd’hui plus que jamais, elle avait été là pour lui quand il avait été lié, elle était toujours là pour lui, c’était la personne la plus forte qu’il connaissait, elle ne flanchait jamais, son incroyable femme, et aujourd’hui elle se laissait enfin aller.
Alors Graham devait être fort pour eux deux, le temps que la vague de détresse passe. Il la serre contre lui comme elle l’avait fait quand il était revenu de la Chasse, c’était tout ce qu’il y avait à faire pour le moment, il lui souffle qu’il l’aime, qu’il était là pour elle, et quand elle se détacha de lui il attrapa son visage entre ses mains, une fois de plus, et essuya ses larmes, un pli soucieux entre les sourcils.
Il se contenta de hocher la tête à ses paroles. Prévenir Minuit et Benjamin était essentiel, ce n’était pas quelque chose qu’elle pourrait (ni ne voulait) leur cacher. Ça allait être dur, mais c’était impératif.
Un mois à peine après son propre lien à lui… décidément.
Ils en bavaient, ces temps-ci.
Quand est-ce que le monde leur laisserait un peu de répis ?
Ce monde injuste qui faisait pleurer sa femme ?
Il enleva les mains des joues de Fubuki et attrapa ses mains
depuis quand est-ce que j’ai pas touché ses mains ?
tu me manques, hanni, tu me manques terriblement
je te vois tous les jours et j’ai quand même l’impression d’être loin de toi
quand est-ce qu’on va avoir le droit de reprendre nos vies, hein ?
Il savait la réponse, pourtant : jamais.
Jamais tant qu’il y aurait des Étoiles.
Jamais tant que l’incertitude planait sur Polaris.
Jamais, jamais, Graham savait que plus jamais il ne pourrait s’endormir en confiance. Plus jamais il ne pourrait se sentir en sécurité, à chaque seconde il s’inquiéterait pour sa famille.
laissez ma famille hors de ça je vous en prie
Mais il était bien trop tard pour ça, sa famille avait été impliquée dès qu’il s’était mis à vomir de l’acide.
Et voilà qu’elle se retrouvait bien plus impliquée, maintenant.
pas toi, putain pas toi aussi
- Tu feras attention à toi, d’accord ? Promis ?
je peux pas te demander de pas t’impliquer parce que t’as pas le choix
je voulais pas m’impliquer et j’ai été forcé
alors juste… juste fais attention, je t’en supplie, mon amour, fais attention à toi
- … le papier, du coup ? ajouta-t-il un peu stupidement en regardant l’état de la pièce. Ça fait au moins un de nous deux qui risque pas de détruire la maison, je trouve ça pas mal.
Il sourit mais le cœur n’y était pas. Difficile de détendre l’atmosphère quand tout change encore.
- Est-ce que tu ressens déjà quelque chose ? Un endroit où le lien veut t’amener ?
Re: Together Forever [ft. Graham]
Together Forever
« Promis. » Tes mains pressent les siennes. Tu seras prudente. Tu feras ce que tu peux pour te protéger, pour les protéger tous. Pour rester en dehors des ennuis. Tu n’as aucune idée de si ce sera simple ou pas. Tu ne connais pas vraiment le danger. Tu le connais assez. Tu sais ce que Graham a bien voulu te partager. Et tu espères qu’il a partagé tout son savoir. En vérité, tu n’en doutes pas trop. C’est ton mari. Tu n’as pas de secret pour lui. En théorie il n’en a pas pour toi non plus. Tu feras attention à toi oui. Mais tu dois la retrouver cette étoile. Et tu sais qu’en te rapprochant d’elle tu pourrais te mettre en danger. As-tu seulement le choix ? Pas vraiment. C’est une impulsion qui grandit à mesure que les minutes passent. Des signaux dans ton cerveau qui te hurlent de la chercher.
Faible sourire face à ses propos. Un autre jour, tu aurais pu en rire. C’est trop tôt. C’est trop frais. Tu n’y arrives pas. Tu sais qu’il essaie de détendre l’atmosphère. Parce que c’est Graham. Parce que c’est ce qu’il fait. Mais toi, tu n’as pas le cœur à rire. Tu sais qu’au fond, lui non plus. Comment le pourrait-il ? Quand la situation était inversée, tu n’as pas eu envie de rire non plus. « Le papier oui… Je ne risque pas de détruire la maison mais je ne risque pas de protéger qui que ce soit non plus. » Tu ne sais pas quoi faire de ce don tout neuf. Multiplier le papier. Ce n’est pas vraiment intéressant. Surtout si tu ne produis que des feuilles vierges. Tu ne peux même pas être une imprimante humaine. Haussement d’épaule quand la conversation se poursuit. « Je sens que je dois la trouver. Mais je ne sais pas si c’est moi qui m’invente des choses par rapport à ce que tu m’as raconté de ton lien avec Procyon. Je n’ai juste, aucune idée d’où chercher. » Avoues-tu dans un long soupir.
Re: Together Forever [ft. Graham]
oh, mon amour
protège-toi toi-même d’abord, c’est le plus important
Graham est soulagé, en réalité, par le pouvoir de son épouse. Il est soulagé que, pour l’instant, il ne donne aucun signe de pouvoir la mettre en danger. A moins qu’elle ne se coupe avec le papier, évidemment, mais il ne lui semblait pas que ça pourrait porter atteinte à sa vie. Il était, égoïstement sans doute, rassuré que le pouvoir de Fubuki ait l’air tout à fait inoffensif. Au moins elle ne risquait pas de se tuer en perdant le contrôle. Ni de blesser un de leurs enfants. Et, dans le malheur que signifiait ce nouveau lien, ça signifiait toujours du bon.
- Tu viens seulement de l’avoir, ce pouvoir. Tu t’attends pas à savoir tout faire avec dès le début, si ?
Bien sûr que si, il le savait, parce qu’il la connaissait par coeur et que Fubuki était une acharnée, elle maitrisait tout ce qu’elle entreprenait, elle mettait un grand sérieux dans la réalisation de la moindre tâche, c’était quelque chose qui l’avait énormément impressionné, quand il l’avait rencontrée, et qui l’impressionnait toujours beaucoup maintenant, en réalité.
Alors oui, Fubuki se sentait sans doute complètement dépassée et du coup, totalement perdue, mais il savait qu’elle reprendrait du poil de la bête très vite. C’était comme ça qu’elle fonctionnait, sa chère et tendre, et il savait d’avance qu’elle maitriserait son pouvoir bien avant lui.
Il lui serra doucement les mains (oh, comme il chérissait ce contact, comme il se rendait compte à quel point elle lui manquait), et lui offrit un petit sourire un peu fatigué, un peu peiné, de ceux qu’on adresse à son épouse quand c’est reparti pour un tour, quand la vie ne te laisse pas respirer deux minutes, mais que vous vous y habituez, à force.
Ce n’était qu’un événement de plus dans ce qui était devenu le quotidien de la maison Ikeda-Ota depuis quelques mois.
- Ça influence sans doute un peu, ouais. Mais c’est un sentiment normal, je pense. Même si je t’avoue que j’ai que ma propre expérience pour t’en parler, ajouta-t-il en réalisant que le seul autre lié qu’il connaissait… c’était Niels. Urgh. Tu finiras par la trouver. C’est sûr que vos chemins se croiseront, peut-être qu’elle te cherche activement ? Je sais pas. Mais je crois que c’est important que tu suives le lien, et que tu lui fasses confiance.
et j’espère que tu ne tomberas pas sur quelqu’un comme Hazel parce que putain, parle d’une initiation…
- Mais je t’en supplie, hanni, fais attention à toi, ok ? Parce que s’il t’arrive quoi que ce soit…
s’il t’arrive quoi que ce soit je deviens fou parce que tu es le centre de ma vie
bon, avec Minuit j’entends
mais si l’un de vous disparait…
je préfère ne pas y penser
Re: Together Forever [ft. Graham]
Together Forever
Moue embêtée et puis sourire pincé. Tu hausses les épaules. « J’imagine que non. » Non, tu ne peux pas tout savoir faire. D’ailleurs, tu ne sais même pas exactement ce que tu es capable de faire. Après plusieurs mois, Graham ne maîtrise pas encore son pouvoir. Qu’est-ce qui te fait penser que toi, en quelques secondes, tu serais différente ? Tu ne l’es pas. Tu n’es pas différente de lui. Pourtant tu as besoin de ça. Tu as besoin du contrôle. De tout contrôler. Un peu comme ta chère mère finalement. Elle qui voulait contrôler ta vie, celle de ton frère, celle de ta soeur. Oh tu n’es pas ainsi avec tes enfants, fort heureusement. Mais tu n’aimes pas perdre pied. Tu n’aimes pas faire face à des barrières invisibles qui te semblent infranchissables. Ça t’enrage autant que ça t’effraie. Tu as toujours mis un point d’honneur à être capable de tout surmonter. Et jusque là, tu as fait un travail admirable. Or, les étoiles, les pouvoirs, tout ça c’est trop. Trop complexe, trop ingérable. Tu ne contrôles rien et tu hais ça.
Est-elle vraiment en train de te chercher, ton étoile ? Tu n’en sais rien. Comment pourrais-tu savoir de toute façon. Ce sentiment est nouveau. Ce lien, tout frais. Tu es encore bien loin d’être habituée à ressentir tout ça. Toute cette connexion avec quelque chose, quelqu’un que tu ne connais pas, que tu n’as jamais vu. Pourtant, c’est comme si ça avait toujours été là. Comme si tu avais toujours été liée. Indescriptible. Tu n’as jamais ressenti ça. Pas avec Graham. Pas avec Minuit. C’est une toute autre forme de connexion. « Je la trouverai. » Affirmes-tu alors, peut-être plus sûre de toi que tu ne l’as jamais été. Peut-être plus résolue aussi. Les choses doivent bouger. Et surtout, tu refuses de vivre ce qu’a vécu ton époux dans ces souterrains maudits. « Merci d’être là. » Tu murmures rien que pour lui. Tu serais bien perdue sans Graham. S’il n’était pas là, s’il n’existait pas, s’il ne t’aimait pas. Tu es reconnaissante pour ce que tu as. Tu es reconnaissante pour tout l’amour qu’il te porte. Et, jamais sans doute, ne seras-tu capable de lui montrer à quel point il compte pour toi.
« Je serais prudente, je te l’ai promis. Il ne m’arrivera rien. » Tu fais des promesses que tu ne pourras probablement pas tenir. Mais qu’est-ce que tu en sais pour le moment de toute façon ? Rien. Parce que si la seule histoire que tu connais est celle de Graham et qu’elle n’est pas très rose, tu es loin de te douter à quel point vous n’êtes que sur le sommet de l’iceberg. Alors tu promets que ça ira, que tu seras sauve. Tu promets sans savoir. Ton regard qui se noie dans celui de ton mari quelques secondes de plus. Et puis un soupir presque frustré quand le bruit d’une dispute sororale t’agresse les tympans. « Je suis déjà en retard. Et elles ne vont pas tarder à l’être aussi. » L’idée même de prendre une journée de congé pour digérer tout ça ne te traverse pas l’esprit. Il y a plus important. Et tes patients ne peuvent pas attendre. Ta tête qui rencontre son épaule et tes bras qui se rejoignent dans son dos pour dernière étreinte avant de devoir partir. « Je n’ai aucune envie de bouger de là. » Parce qu’il n’y a que dans ses bras ou dans ceux de Minuit que tu te sens réellement bien.
Re: Together Forever [ft. Graham]
oh, mon amour…
- Dans la santé comme dans la maladie, dans la joie comme dans la peine, tout ça tout ça… Moi j’ai pris ça très sérieusement, répondit-il avec un léger rire qui eut du mal à sortir.
Parce qu’il était mort de trouille. Il était terrifié pour sa femme, absolument terrifié pour son futur, et ce que le lien impliquait. Parce qu’il était terrifié qu’elle ait à vivre ce que lui avait vécu, qu’elle ressente le même genre de douleur, le même genre d’effroi, le même genre de peine et de détresse.
Graham balayait souvent son mal-être par de l’humour léger, c’était un défaut qu’il se connaissait depuis toujours.
Quand elle lui dit qu’il ne lui arrivera rien, tous les deux savent que c’est un très gros mensonge. Elle ne peut pas prévoir, bien sûr, ils étaient bloqués au milieu d’une guerre céleste trop grande pour eux, ils n’étaient rien, dans tout ça, et on ne leur avait pas demandé leur avis.
Les cris des petites les font revenir à la réalité, celle d’une journée normale qui était censée commencer. Les filles. L’école. Le travail. Les devoirs et le souper. Oui. Tout devait tourner, encore, parce que certaines vies dépendaient des leurs.
Il serra Fubuki contre lui une dernière fois, pour se donner de la force, pour leur donner du courage.
- Moi non plus, mais tu vas être vraiment en retard. File, je m’occupe des filles.
Et, oubliant sciemment l’acide qui courait dans ses veines, il se pencha pour embrasser sa femme. Ils se l’autorisaient si rarement, depuis l’éveil de Graham et ce pouvoir maudit, que ça lui procura la même joie incandescente que les premières fois.
- Et puis pour le reste… on verra ce soir, d’accord ?
Il se leva avec un fin sourire, aida sa femme à se redresser, et avisa le papier autour d’eux. Il pouvait ranger tout ça rapidement avant que le timing ne soit vraiment limite.
- Les filles ? On part dans cinq minutes ! Margot, tu veux bien mettre les tasses dans l’évier ? Et Tomoe, s’il-te-plait mon coeur, mets deux fois les mêmes chaussures aujourd’hui, d’accord ?
La routine reprenait.
Le monde ne pouvait pas s’arrêter de tourner.