Danh et ses idées de merdes, crachait les pensées noires de l’adolescente. Mais un mince sourire se dessina malgré ses conjectures internes agacées et violacées. Son frère, voici bien un être qui était imprécis et précis vu le nombre de rejetons que sa mère a pondu. Mais un frère comme Danh, on en souhaitait qu’un seul et encore, cela était bien assez.
Il avait une certaine audace, pensait-elle. Ce matin 8h sonnait paresseusement sur le réveil chiné au petit bonheur la chance dans un magasin de quartier, on languit sous la couette Mari, elle était enchantée de se dire qu’elle a enfin une journée à elle. Une journée sans bruit, une journée sans misère et elle s’étirait baignée par un soleil bleuie par l’hiver les bras violacés des activités de la veille. Elle avait pris un petit déjeuner ou deux, les genoux remontés sur son menton tandis que ses yeux étaient occupés à détailler un magazine quelconque les idées perdues sur les robes que son esprit trop heureux de s’activer, conceptualiser.
Puis un SMS, sonnerie irritante pour les oreilles de Marigold. Son frère réclamant soin, elle voulait l’envoyer paître mais un simple “Ok” fut tapé.
Son sac était lourd car elle savait d’avance que ce qui allait venir n'était pas un travail de routine comme les soins consciemment appliqué sur sa peau fraîche. Non, nous parlons de son frère et comme tout homme qui se respecte, il n’a aucun respect pour sa peau, ses cheveux et encore moins les différentes nuances entre une lotion et une crème. La porte d’entrée de l’immeuble n’était pas défoncé aujourd’hui, curieuse pensée qui traversait son esprit. Elle montait les marches, jurant un peu plus dans son fort intérieur d’être venu. Mais arrivée devant la porte, un coup de pied dans la porte de bois massif vient témoigner de l’arrivée de cette soeur trop utile.
La porte s'entre ouvre, les yeux se croisent et Marigold, decoiffée comme une folle et le visage mordu par la fraîcheur du jour dit juste :
-Yo.
Et c’était le début de son action, pénétrant chez lui et son nez était déjà froissé face à l’étendu du laisser-aller fraternel. Elle n’allait pas céder, pas aujourd’hui. Son écharpe fut vite fait retirer tandis qu’elle détaillait le visage de Danh. Il semblait pas frais, sans doute une nuit blanche, les pores étaient dilatés mais la familiarité certaine de ses traits apaisait déjà son être.
-T’es incroyable frère, tu as tant besoin qu’une meuf te touche pour m’appeler pour “te faire une beauté ?”
Aucune réponse ne pouvait faire tressaillir le ton moqueur et affecteur de Mari, elle le connaissait que trop bien après tout.
appartement de Danh
Quelle heure est-il ? Il ne sait pas. Il s’en fiche, Danh. Il… Il s'amuse. A faire des petits monticules de sables avec ses doigts, puis à les reformer en éléments solides. Tout cogite un peu dans sa tête. Ange. Cursa. Cercle. Lié. Des noms. Trop à retenir. Il ne s’en souvient pas vraiment de tout. Le seul truc qui lui fait dire qu’il n’est pas en train de se taper un mauvais coup suite à une cuite, c’est qu’il est vraiment bel et bien capable de produire du sable… Un autre petit monticule de crée, cette fois avec sa main complète. Avant de le détruire pour reconstruire sa main. Danh, il l’a regarde. Il l’a jauge. Elle est normale. Tout est normal. Et pourtant, ça ne devrait pas l’être, si ? Pour toute réponse à cette question, Danh, il refait un petit tas de sable. Et c’est après un temps infini qu’il attrape son téléphone. Il envoie un message à sa petite sœur ; il sait qu’elle est en ville, et il espère qu’elle est disponible. Il veut juste parler de ça à quelqu’un, Danh. Il ne sait pas à qui. A qui pourrait-il dire ”eh mec, mate, je deviens un sable, c’est drôle” ? En vrai, il y a bien les gens qui devraient à priori former son cercle ; mais… Bah disons que de ce qu’il a compris, Danh, eux, ils doivent le savoir qu’il a des pouvoirs. Enfin, c’est compliqué ; et de toute façon, la question première est : a-t-il envie de parler de ça à quelqu’un d’autre que sa sœur ? Non, pas pour l’instant. Donc la réponse est vite trouvée.
Une réponse une tard, Danh s’active un peu pour rendre l’appartement un minimum présentable. C’est à dire juste, remettre les quatre chaises autour de la table du salon ; pour le reste, la motivation s’est vite éclipsée. Il sort aussi deux verres et une carafe - d’eau - parce que c’est toujours bien de s’hydrater. Surtout avec ce qu’il s’apprête à lui dire.
Un coup contre la porte lui signale son arrivée. Danh ouvre, se prend un yo en guise de salutation, ce à quoi il répond bien vite.
La colère ne tapissait pas ses entrailles car elle savait que s’énerver contre Danh avait la même puissance que tenter de frapper de la gélée, au début ça tremble un peu mais à la fin ça te regardera avec ses mêmes yeux de chèvre perdue. Puis il avait un point certain, elle ne serai certaine pas venue, les téléphones et la fonction appel illimité existe bien pour cela. Un long soupir vient approuver les dires de Danh, reconnaissant la justesse de ses mots tandis qu’elle se délassait de son sac au pied d’un meuble dont la fonction semblait oscillante entre la table, le débaras et le club de réunion de l’odeur des pâtes au ketchup.
Marigold s’assit sans faire un bruit, l’agacement visible dans son regard clair tandis qu’elle regardait son frère habité par une étrange émotion. Son teint blême qu’elle avait prit pour une nuit blanche semblait s’aviver sous le coup d’une excitation certaine et ses yeux luisaient d’une étrange lueur qu’elle n’avait vu que pendant les noels les plus spéciaux chez Charlotte. Immédiatement son esprit entrevit le pire.
1/ Il avait fait quelque chose de vraiment grave et cool selon ses standards
2/ Il a gagné le Loto et lui avoue qu’il a racheté Lustucru pour le renommer lustucrdanh
3/ Il avait une tumeur et il s’éclatait à lui donner des petits noms.
Danh…je vais pas gueuler j’te jure mais t’aurais pu m’appeler t’sais. Je promets pas d’avoir décroché mais ça aurai eu le mérite…enfin merde oublie. Je plains ton voisin, il doit être gavé par toi.
Pauvre petit vieux que Marigold croisait parfois et dont il lui offrait des coups d’oeils partagés entre la fatigue, la compassion et l’ennui, et Marigold répliquait en lui offrant l’un des sourires solaires dont elle avait le secret. Danh n’avait pas un soucis de bruit mais un souci d’odeur et de propreté, ce qui était en soi pire que les bruits. Elle repensait à ce paillasson, tombé au combat mais toujours devant la porte tel un soldat qui ne connait plus la vérité derrière les mensonges de ses supérieurs.
Magie ? Ses yeux roulaient librement dans leurs orbites tandis qu’une moue desespérée vient peindre son visage. Malgré l’habituelle indolence de son frère, quelque chose hérissait le poil de Marigold, un pressentiment s’amassait sous son épiderme sensible et elle ne pouvait que se demander bêtement si quelque chose d’au-délà de ses compétences est arrivé. Oh, elle se rappelait bien de ce livre où un abruti invoque un dieu lovecraftien par accident.. Danh n’aurai pas pu invoqué un dieu quand même ? L’absurde se mêlait à l’angoisse ordinaire de son être mais elle n’affichait que son ennui innocent. Si Danh savait le sens de ses pensées, il serai bien trop perturbé et…
Attends depuis quand cette odeur était présente ? Cela sentait comme la plage, cette odeur lourde et prégnante autour d’elle et elle semblait apercevoir au coin de l’oeil des petits montincules de ce qui semblait être une poussière…de la poussière ? Pouvait-elle sûre ?
-Euh…ouais Danh ? Si tu m’avais fais venir pour me montrer que tu peux faire disparaître des cartes dans tes manches, je serai fière de toi quand même, mais c’est pas vraiment de la magie hein.
Bien malgré elle, elle s’était avancée de son siège, les yeux pleinement focalisé sur son frère.
appartement de Danh
C’est un long soupir très audible qu'il fait, Danh, en entendant sa sœur lui dire qu'il pouvait juste appeler. Non, ce qu'il avait à lui dire… c'était plutôt à lui montrer. Et… Disons aussi qu'il ne sait pas si le sable passe par le téléphone. Probablement non.
Il parle de sa petite magie très brièvement - si on peut appeler ça magie… - mais il voit bien que Marigold est un brin impatiente… mh, plutôt un certain mécontentement ? Bon, il peut comprendre, il l'a fait venir ici pour tout à fait autre chose que ce qui était prévu initialement. Du coup, il se hâte de la reprendre.
Il tire une chaise, Danh, il s'assoit. Face à sa sœur, afin qu’elle ne loupe rien du fameux spectacle qui va se dérouler devant elle.
Danh tu fais VRAIMENT peur.
Son frère, un long soupir vient toujours accommoder les pensées autour du personnage mental qui se crée dans son esprit terne. Il représente l’existence étrange et le vécu ordinaire, les pâtes à l’égouttoir trop cuites mais dorées et le frigo miracle offert parce que la dèche était trop forte, que Danh a repoussé d’un geste de main en disant que ce n’était rien. Tout ces choses se construisaient dans l’imaginaire de Marigold comme un vain château, se modelant au gré des actions contradictoire de son frère.
Il l’enjoint à ne pas crier et bien malgré elle, ses yeux viennent rouler à l’arrière de son crâne. Pourtant, quelque chose de nerveux vient se loger en elle, la dernière fois qu’il a dit ça ce fut une véritable catastrophe qui hante encore les pensées honteuses de la nuit tombée. Danh et les surprises c’était une longue histoire et une histoire que Marigold ne souhaite pas répéter. Alors elle fit un premier geste, un tout petit geste. Faire mine de se relever de la chaise, plisser les lèvres, tout pour retarder l’inévitable puis, l’étrange apparu.
Danh devenait sable, sa main mainte fois touchée devenait souple, son regard avait toujours la même excitation d’un enfant découvrant que son sabre laser pouvait s’allumer et son excitation perçante ne trahissait aucune douleur. Est ce qu’elle devenait folle ? Est ce que son esprit troublait ce que ses yeux voyaient dans un vain espoir de préserver ce qui se passait vraiment ? Qu’est qui se passait ?
Sa voix disparaissait au fond de son gosier et le sang avait définitivement vidé son visage. Attends quoi ? Le petit tas de sable sur la table était de son frère ? Elle voulait le toucher, mais rien de son corps ne répondait, l’absurdité de la situation était trop haute. Bordel de merde, entre tout les losers de cette maudite terre, il a fallu que ça soit SON frère qui se retrouve paré avec des supers-pouvoirs. Oh, elle n’y connaissait que dalle en comic, mais ça sonne comme si il va finir par être impliqué dans une bataille entre la vie et la mort, une crise existentielle et perdre quelqu’un qui lui était cher.
Bordel, les ennuis étaient déjà suffisants dans sa vie pourquoi, il fallait rajouter ça.
Mais elle ne peut que craquer un mince sourire devant le plaisir manifeste de son frère, lui constamment impassible il découvrait quelque chose de cool dans son ordinaire ketchupien. Mais l’angoisse appuyait sur ses tripes comme un milliard d’aiguilles chauffée à blanc. Elle voulait vomir, tandis que le bras revenait à l’ordinaire comme si tout n’était que mirage.
Mais ce n’était pas, il venait de confirmer le sable en renchérissant sur son surnom. Elle ne dit rien, Marigold. Assise sur cette chaise défoncé au milieu d’un quartier oublié par les riches, elle ne pensait à rien de plus que pourquoi lui ? ça allait attirer les intérêts de quelqu’un, partir en couilles un moment ou un autre et, danh n’était pas le plus brillant des cuillères à café, il va faire des conneries.
-Cool…cool…mais tu t’écoutes parler parfois ? Bordel de chiasse, SANDMAN? Tu peux pas trouver mieux qu’un méchant de type B de Spiderman ?
La colère comme première réaction, puis le blême, sa tête est trop lourde et la bile s’accumule derrière ses lèvres.
-Putain Danh, pourquoi tu es toujours fourré dans des trucs pas possible ?! D’où ça sort, tu as pas fais un pacte avec une entité surnaturelle rassure moi ? Tu es pas un descendant d’un dieu ? Oh non, je rêve, c’est ça. Je suis dans mon lit et je rêve. Si c’est un rêve, je simule vachement bien l’envie de gerber.
Vraiment, ce n'est pas tout les jours qu'on découvre que son frère est un être ayant franchi les limites de la banalité.
appartement de Danh
Le regard reste fixé sur sa main nouvellement reconstruite. C’est que ça a beau être depuis quelques semaines qu’il est capable de faire ce qu’il fait, il n’en reste pas moins fasciné de voir ce qu’il est capable de produire. Il entend la réaction de Marigold face à ce qu’il vient de lui sortir, face au fait qu’il trouve ça cool, Danh. Que peut-il lui répondre ? Qu’elle a raison ? Oui, certainement. Mais bon, il ne veut pas, Danh. Parce qu’il ne peut rien changer. Alors, il reste dans son éternelle attitude. Enfantin et blasé, à n’écouter que ce qu’il peut affronter et répondre, le reste… Le reste, ce n’est pas son problème.
C’est qu’il l’entend encore entrer dans une sorte de presque colère. Ouais, ouais. Il comprend Danh. Il comprend. Mais, il ne veut pas se faire engueuler par sa sœur. Enfin, même mieux, il ne veut pas se faire engueuler tout court.
Ah, c’est qu’il comprend vraiment l’inquiétude - il suppose que ça en est ? - de sa sœur. Si les situations étaient inversées, il serait dans le même cas. Et, il sait aussi que lui n’est guère plus avancé qu’elle. Juste… Qu’il prend l’affaire à sa manière.
Et puis, une nouvelle fois, Danh, il se lève. Machinalement, il ouvre la porte de son frigo, pousse un énième soupir.
L’inconnu était chose profondément déplaisante pour Marigold, l’inconnu lui avait volé son innocence et son temps, alors qu’il lui parle de meufs zarbes, de trucs en dehors de sa compréhension, c’était bien assez d’information pour une vie. Qu’elle se sentait conne avec ce saladier entre les mains, les émotions contenues dans son visage incapable de se transmettre en mots. Les mots, ce sont les pires horreurs du monde quand on les cherche, ils disparaissent sans se faire prier. Secouant sa tête pour chasser la nausée, elle pinçait ses lèvres en une fine ligne tandis qu’une certaine contenance venait la reprendre.
Elle peut gérer ça
Elle a pu gérer autre chose
Marigold peut gérer avoir un frère avec des super-pouvoirs à deux balles comme elle a pu gérer un frère ayant le QI d’une moule pas très fraîche.
Posant le saladier sur la table, son autre main vient pincer l’arrête de son nez tandis que la pensée d’une simple soirée à papoter avec son frère disparaissait définitivement de son esprit. Il fallait récapituler, et Marigold n’aimait pas particulièrement récapituler.
-Donc, Danh. Une meuf est venue te voir, t’a dit “olala, tu es l’élu”, tu peux manipuler du sable. Et tu me dis que t’as même pas cherché à savoir pourquoi toi, pourquoi le sable, pourquoi maintenant ? Elle t’a expliqué quoi ? Mec, tu dois être le random le plus aisé à recruter dans un culte, j’te jure, même les mecs du milieu ils galèrent plus à chopper des filles que la meuf t’a recruté dans son truc. Ta meuf là, elle t’a rien demandé de vendre ou quoi que ce soit ? Parce que les systèmes pyramidales, ça devient n’importe qu’. Mais ok-bon…ok
Elle avait bien assez enfoncé le bouchon pour aujourd’hui, pis elle était pas Charlotte. Elle imaginait déjà son air outré si elle venait à savoir que Danh pouvait manipuler le sable, le grand discours sur responsabilité et pouvoirs et blablablablabla. Même si elle pouvait chasser l’angoisse de son visage, elle ne pouviat pas chasser l’angoisse de son coeur tandis qu’elle dessinait le sourire vendeur et les paroles mielleuses de ses emplois :
-T’as intérêt à m’emmener à la plage plus souvent. Maintenant que tu contrôles le sable, t’crois qu’il y a un mec qui maîtrise l’eau ? Et sinon, t’as des horaires, genre, tu me parles d’avant où tu foutais rien, là tu vas devoir foutre un truc? Genre noyer le quartier d’octant avec ton sable ?
Elle l’observait avec intêret tandis qu’il se dirigeait vers le frigo, oui, elle pouvait bien utiliser une boisson gazeuse pour étouffer les choses du monde qui s’acharnait à vouloir la tabasser ces temps-çi. Levant d’un coup, l’étrange fragilité qui émanait de son frère lui était bouleversante tandis qu’elle appuyait son visage contre son épaule, sa main attrapant discrètement l’une des dernières canettes de coca contenue dans la porte.
-Bien, bien, je m’incline danhette, j’me prends un coca, j’oublie ma vie avec du sucre et j’te dis que je trouve ça cool. Je suis jalouse, tu crois qu’elle peut me recruter aussi ? Mais pourquoi le sable aussi ?
Noyer, noyer, noyer les angoisses.
Faire comme çi, c’était banal.
Elle n’arrive pas à retirer sa joue de l’épaule de son frère.
appartement de Danh
Il ne sait pas quoi penser de la réaction de Marigold, Danh. Parce qu’à vrai dire, il y a totalement de quoi être perturbé. A vrai dire, il y a totalement de quoi être perdu. Il l’est, lui le premier, alors qu’il a reçu toutes les informations - enfin, il suppose qu’on lui a balancé toutes les informations, mais ça, il ne peut pas le prouver. Il l’écoute faire son récapitulatif, il se contente de hocher la tête quand il approuve ; ou de froncer les sourcils quand il ne comprend pas ce que Marigold raconte, où alors quand elle raconte un truc de faux, où alors quand elle raconte un truc auquel il n’avait pas pensé.
Un léger sourire vient se dessiner sur ses lèvres, à Danh. La conversation perdait un peu de son sérieux, et ça ne lui allait que pour le mieux. Pas qu’il ne soit pas capable de tenir une discussion sérieuse, c’est même le contraire… Juste, pas aujourd’hui. Pas d’un tel sujet avec Marigold. Ah, il ne l’avait pas prévu la réaction un peu trop terre-à-terre de Marigold…
Danh ne sentait pas bon, loin de là. Elle avait beau venir faire ses machines et lui apprendre à trier le linge qu’il haussait les épaules en disant qu’il s’en fichait que ça se sent la lavande ou l’honolulu sur ses t-shirts parfois troués. Elle voulait retourner dans une timeline qui n’existait pas, une timeline où tout irait bien. Mais ça n’existait pas, ça n'existerait jamais alors elle acceptait que son frère sente la sueur et l’alcool, qu’il maîtrise le sable et qu’elle ne puisse jamais les protéger. Du moment qu’elle sait, du moment qu’elle n’est pas gardée dans l’ombre, ça lui ira. Mais Marigold devait jouer des coudes car elle sentait la réserve de Danh derrière ses muscles tirés, s’inquiétait-il pour elle ? Ah, ça serait peu à propos.
Portant la canette à ses lèvres, elle eut un éclair joueur dans ses yeux puis vient tirer la deuxième canette pour l’appuyer contre l’avant-bras dénudé de son cher frère :
-Tiens pour avoir ton quota de sucre, bg. Et aussi parce que pour détruire le monde faut être en forme, si tu veux bien épargner les galeries commerciales de ton sable, ça serai hyper chouette. Si tu pouvais parler à ta boss aussi de ses plans, parce que, voilà quoi, c’est chelou. T’es le seul comme ça ? Ou vous êtes genre comme les avengers du cringe ? Elle t’envoie quoi comme sms ? “V1s on va péter la gueule à l’autre chef des avengers d’en face ?” Pis c’est quoi son nom ? Nick Fury ?
Rire étouffé, fière de sa propre blague mais ses yeux se dardaient sur son frère avec l’intensité d’une harpie figée sur sa proie. Mari se détachait enfin de son frère, appuyant sa longue carcasse contre le rebord de la porte et faisant mine de boire avec détachement son soda
-Pour revenir à plus tôt, Danh. Non, je ne te ferai pas vendre quoi que ce soit, parce que j’sens la catastrophe. Donc, j’me demande pourquoi toi quoi ? Non pas que tu ferais pas un méchant formidable, dans Batman, il y a le roi des sauces en méchant. J’veux dire, c’est chelou. C’est arrivé un jour comme ça, sans raison. Puis ouais le sable, c’est cool ce que tu veux, mais en quoi le sable ça te correspond ? J’veux dire, le sable, c’est plutôt ennuyant et je n’éclate pas de rire devant toi non plus quoi.
Ses yeux se plissaient bien malgré elle tandis que l’image du bras de son frère se décomposant en sable venait à son esprit. Marigold sentait cette chose qui se presse contre sa rétine, s’imprimant à jamais dans son imaginaire comme l’horreur absolue. Son ton se faisait toujours faussement joyeux tandis qu’elle forçait les mots à sortir de son gosier :
-Sinon, maintenant, t’fais quoi ? J’veux dire avec tout ça… tu dois combattre qui ?
L’inquiétude retombait lourdement, elle n’aimait pas manipuler son frère, elle n’y arrivait jamais complètement.
appartement de Danh
Le regard fixé au loin, Danh, il ne voit même pas Marigold revenir avec la canette, et ce n’est que son contact - glacial - qui le fait soudainement se redresser. Un soupire à moitié bougon vient l’accompagner, histoire d’exprimer son mécontentement quand au fait d’avoir eu un truc froid de posé sur son avant bras. Mais, c’est là la seule réaction qu’il aura, Danh. Il n’en aura même pas quand Marigold vient lui faire une petite remarque, ni quand elle lui parle d’éviter les centres commerciaux. Ouais… Ouais. Il se contente de hausser les épaules. Que peut-il répondre ? Il sait la réponse à certaines questions, mais, il n’est pas certain de vouloir lui dire. Qui sait si ça n’attirerait pas plus d’ennuie à Marigold, que l’inverse ? Et puis, pour les autres questions… C’est là que Danh se rend compte qu’il s’est vraiment mis en tête de suivre tout simplement ce qu’on allait lui dire. Ange lui avait annoncé les choses, il avait accepté sans broncher. Et automatiquement, s’est activé le mode de suivre ce qu’on dit sans réfléchir. Peut-être que la prochaine fois qu’il l’a croise, il songera à ce genre de questions, Danh… Pour l’actuelle… Il pose juste un regard sur Marigold. Un regard de flemme. Oh, bon sang, il ne sait pas comment elle trouve autant d’énergie pour s’imaginer tout ça. Les Avengers du crime, Nick Furry… Un long soupir, trop long, puis, il porte sa canette à la bouche pour en prendre quelques gorgées. Trop froid, qu’il pense, au point qu’il en fait même une grimace. Pas forcément la meilleure des idées du monde que de prendre un truc frais en hiver.
Et puis, c’est reparti, Marigold enchaîne encore et encore. Vraiment, Danh se demande comment c’est possible de trouver autant de référence en un laps de temps si court… Mais faut-il dire aussi qu’elle met un peu de sérieux à la fin de sa phrase. Mais, du sérieux auquel Danh ne sait toujours pas répondre. C’est vrai ça, que répondre à quelqu’un qui demande pourquoi il peut contrôler le sable ? Il le peut, parce qu’il le fait, que qu’on lui a dit que c’était parce qu’il se retrouve lié à une étoile - Cursa, de son nom. Mais pour plus de détails techniques, on ne lui a jamais refilé le numéro du service technique. Il fixe son regard vers sa canette qu’il a abandonnée le temps qu’elle se réchauffe un peu.
Et il repense, Danh. A ce qu’on lui a dit. A ce qu’il a découvert par lui-même. A ce qu’il a dit à Marigold, et à ce qu’il ne lui a pas dit. Aussi à ce qu’il a bien pu lui montrer. Parce que, c’est bien simple, jusqu’à ce jour, mis à part lui-même et les autres joyeux (?) lurons de ce qui constitue le cercle, personne n’est au courant qu’il est spécial - même si, être spécial, aka : avoir des pouvoirs ; ça ne semble pas si rare, si on considère qu’ils sont huit. Lui qui n’a fait qu’accepter sans poser de questions, qui s’est mis en tête que c’était ainsi, qui, en réalité, a préféré ne pas trop s’en préoccuper. Faut croire que c’est l’inverse en fait, ça l’a plus préoccupé qu’il ne le pensait. Sinon, il n’aurait rien dit à Marigold. Il ne sait pas. Oh, c’est qu’il se prend trop la tête.
Il se lève, et Marigold lui pose une question.
Danh l’exaspérait sérieusement parfois, le voir dans toute sa balourdise à trifouiller dans ses méninges pour comprendre dans quel pétrin monumental il s’est foutu de gré ou de force emplissait Marigold de la lassitude saine des petites soeurs.
Gorgées après gorgées, elle sirotait son coca dans l’espoir que le sucre -bienfaiteur- vienne chasser la boule logée au fond de sa gorge. Elle se rappelait de son enfance, penchée sur les genoux de la nourrice payée pour prendre soin d’eux, et de sa parole dans un anglais alourdie par son accent russe
“Une bénédiction sans sacrifice n’est qu’une malédiction à venir, Marigold”
Elle n’avait pas compris, petite enfant à la chevelure bouclée et à l’esprit limité par les poneys qu’elle dessinait à la hâte dans les coins des cahiers. Mais maintenant, dans les yeux vitreux de son frère, au milieu de ce quartier de merde, les mots de sa nourrice prennaient le goût d’un sorbet citron bien trop acide.
Une malédiction…
Elle se souciait bien peu d'elle-même Marigold, elle savait qu’elle allait survivre. Elle a toujours survécu, toujours. La vie la haïssait bien trop pour lui donner le plaisir de mourir et elle avait trop l’envie de cracher sa colère à la gueule du monde pour se laisser mourir. Mais elle se souciait pour Danh, pour sa stupidité, sa tendance à voir le monde comme on lui donnait, elle se souciait de ses choix, elle gémissait déjà de la douleur qu’il devrait très bientôt affronter. Mais le masque devait rester léger pour pas qu’il sache qu’elle pensait déjà à des soirs sans sommeil où elle regardera sur son téléphone à quel point la ville devient folle et qu’eux, les deux gosses de la portée Wheeler sont au milieu de tout ça. Une pensée s’envolait vers Charlotte, qu’aurait-elle dit pour faire comprendre à Danh tout ça ? Elle aurai mit ses poings sur les hanches et aurait juré un truc, ou deux, puis des exemples à la pelle, une colère fermée et elle aurait tout pris sur elle. P’rce que c’était son truc, de se voir plus grande que le monde.
Canette finie, la mélancolie se dissipait sans grâce tandis que Danh s’agitait face à elle, tirant feuilles et stylos d’un tiroir désordonné. Il s'assoit face à elle et les sourcils dessinés de Marigold viennent se soulever face à l’étrange sérieux qu’il montrait. Un râlement inaudible à l’idée de ses cachotteries vient chatouiller sa glotte mais mieux que rien, plus elle saura, plus elle pourra chercher moyens d’agir pour le protéger. (le protéger… depuis quand voulait-elle le protéger ?)
-J’aime pas tes cachotteries Sandman, mais Ok, mieux que rien. Faut que t’apprennes à être curieux frangin, la prochaine fois que tu vois ta go, faut la cuisiner.
Attrapant une mèche entre ses doigts, Marigold se mit à énumérer toutes les pensées apparues à son esprit et les questions :
-Ok, vous êtes combien ? Pourquoi tu as des pouvoirs ? D’où viennent ses pouvoirs ? Pourquoi toi ? Quel est le but de votre “transformation” ? Est ce que tu as constaté des modifications physiques ou bio-bio-biomé..biométrique -sa langue se déliait sur ce mot- ? Il y en a t-il d’autres comme ta go ? As tu une limite d’utilisation de tes pouvoirs ? Si oui laquelle ? Pourquoi Polaris ? Est ce que ta transformation à un lien…avec tout ce qui s’est passé à Halloween ?
Elle chuchotait presque ses derniers mots, les filles au boulot ont beaucoup chuchotés à ce propos, certains disaient même que…non, ce ne sont que des rumeurs et Marigold n’aimait pas en parler des choses infondées.
appartement de Danh
Dans l’esprit de Danh, le mélange entre le besoin d’exprimer son ressenti, le besoin de protéger et d’éloigner Marigold de tout ça, et l’envie de simplement se dire que tout va passer ; tout ce mélange là, il se bouscule, à ne pas savoir sur quel pied danser. Il essaye d’y faire abstraction, Danh, de vivre l’instant présent, sans se soucier ni du passé, ni du futur. D’ailleurs, il aime se dire qu’il a toujours vécu ainsi, Danh. A ne se soucier que du présent, à être au fond, un peu trop égoïste, mais qu’après tout, ce n’est pas si grave, parce que comme on ne sait jamais de quoi demain sera fait, autant vivre à fond l’instant présent. Mais, c’est un mensonge. Un énorme mensonge. Danh, il s’est toujours bien plus soucié du futur - qu’il s’agisse du sien ou des autres - qu’il veut bien l’admettre. Pourquoi aurait-il rejoint la capitale, il y a quelques années maintenant, sinon pour donner un sens à sa vie, et ne pas croupir misérablement comme son paternel ? Et même, si on décide que cela remonte à trop longtemps… On peut prendre l’exemple de l’immédiat : pourquoi voudrait-il bien discuter de ce qu’il lui arrive à quelqu’un qu’il estime profondément ? Est-ce par simple lubie ? Non, certainement pas. Absolument pas.
Un maigre sourire se dessine sur ses lèvres. Être curieux… Ce n’est pas qu’il ne veut pas. C’est qu’il préfère ne pas y réfléchir. Parce qu’il craint plus les réponses qui peuvent y être apportées. Parce qu’il… Parce qu’il ne serait peut-être pas y réagir de la meilleure des manières. Déjà qu’il sait, Danh, qu’il n’a jamais eu les meilleures réactions au monde.
Et puis, l’avalanche de questions. Oh, il devait s’y attendre à ça, Danh. Bien évidemment que oui, il devait s’y attendre.
Il soupire, il se recule sur sa chaise. Il regarde Marigold, tout le sérieux du monde dans son regard. Que faut-il faire, que veut-il faire ? Marigold, elle est trop jeune pour avoir à vivre ça. Elle n’a pas à être impliquée dans de sales affaires.
Ses yeux se braquent sur Danh, deux faisceaux ardents de curiosité et ses mots étaient tus. Suspendus à peine dans l’air, son intêret se lisait sur ls traits fatigués de son visage. Marigold avait cet élan de brûlure, cette volonté de saisir de ses deux mains ce qui était au dessus de ses capacités. Elle souhaitait tout comprendre sans jamais pouvoir intégrer ces savoirs, elle était une enième jarre trouée et ses connaissances ne valaient si peu face à la suffisance dans laquelle elle se drapait. N’avait elle pas cru faire mieux que tout le monde en claquant la porte de ses aînés ? Elle et ses boucles dorées, sa fraîcheur et son teint rosée.
Elle écoutait, absorbant chaque découverte de son frère sans que le moindre mot ne franchisse ses lèvres. Fou, tout cela était fou. Si elle ne connaissait pas autant son frère, si elle ne saissisait pas aussi parfaitement les aboutissements de son être, aurait-elle pu croire qu’il mentait effrontement ? Elle avait vu son sable, cette horreur contre les lois des hommes mais, pouvait-il lui mentir plus ? Non, il n’avait rien à gagner. Rien à perdre. Alors sa vérité était aussi limpide que la neige de décembre. Des étoiles sur terre, des pouvoirs, des hommes et des femmes comme mon frère. Le vertige la prit brusquement, toutes ces choses qu’elle ne connaissait pas, ce monde tapi sous ses pieds. Cette guerre sous ses yeux clairs, voilà ce dans quoi son frère s’embarquait. Cette guerre qui avait des impacts bien visible, c’était pas normal.
Comment pouvait-elle savoir si il ne lui cachait pas pire ? Comment savoir si il n’allait pas mourir aujourd’hui ou demain ? L’angoisse de la mort avait le goût de ces baisers regrettés, ces lendemains désolés et Marigold ne pouvait rien y faire. Absolument rien. Si il avait été “choisi” après Halloween, c’est que peu importe ce qui se passe, ce n’est pas fini. Tout cela n’est pas fini. Les pensées troublent la vision, elle ne ressentait plus rien. Tout était trop gros, elle avait beau jouer la fille cool, celle qui ne soucie de rien. Celle qui vit et rit, elle subissait. Encore et encore, et encore et voilà que son frère était pris.
La voix de Danh coulait autour d’elle, dans un discours qu’il semblait de ne pas maîtriser. Terrifiant, putain de terrifiant. Elle n’emerge pas, un oreille perdue se dresse quand il parle tandis que la couleur se drainait de son visage. Sa tête se balançait lourdement, comme une approbation silencieuse de sa demande. Il posait des questions et elle n’avait aucune réponse. Juste sa main qui venait s’abattre sur le bois factice de la table. Une grimace fulgurante de douleur traverse son expression avant que sa voix d’une légereté sirupeuse vient répondre à son frère :
-Pour aller où Danh ? C’est ici, chez moi. Le destin m’aime trop peu pour me tuer aussi rapidement, tu sais. J’irai bien, Danh. Tout ira bien.
Ces mots sont vides de substances, elle n’y croyait pas du tout. Elle n epouvait pas y croire. Non, ils n’iront jamais bien à present. Mais il fallait tenir bon.
-Cependant…si tu es VRAIMENT inquiet..je partirai de Polaris. Je ne sais pas où j’irai, mais j’irai. J’ai l’air d’une française, pas vrai ?
Rire mielleux, on noie les angoisses sous des aneries avant que son regard se fasse sérieux
-Pour être honnête Danh, je ne comprends pas tout. Une partie de moi n’arrive pas à accepter que ce que tu me dis est vrai, j’ai vu ce.;ce que tu peux faire. Mais de l’autre, c’est si gros que je ne pourrai l’accepter aussi pleinement que toi. Je ne peux que t’écouter, parce que…tu dois être seul non? Te sentir seul. Je n’aime pas savoir que tu es seul, que tu as peur. C’est étrange, c’est toi qui doit me protèger mais je ne peux m’empêcher de vouloir fairs plus. C’est surréaliste ouais, c’est timbré, c’est terrifiant. Mais hey, je reste parce que je suis pas une trouillarde au point de laisser mon frère se faire buter par des étoiles.