Du coup, t’es rentrée comme une fleur dans le bureau des écuries, sans rien sauf ta mélancolie et ton désir de tourner une page d’une tonne. À peine quelques pas à l’intérieur de l’édifice, et un bel homme leva la tête au-dessus du comptoir pour t’accueillir.


Et là.


Une violente vague de souvenir vint te frapper en pleine gueule. Tu plonges la main dans ta poche et tu sers fort ce putain de coupon que t’avais mis à l’arrache dans ton short. Ce mec-là. Devant toi. C’était lui qui vous avait accueilli à l’époque. C’est un type très sympa et surtout passionné. Mais le fait de le revoir, te le fait revoir, lui.


Go next on a dit. Aller Hizzie. Coup de tête aux souvenirs et on passe à autre chose.


Du coup, tu te rapproches du comptoir, tu sors ta main de ta poche en t’insultant intérieurement. * Débile de toi. Il ne va jamais vouloir reprendre son coupon vu l’état. *

Tu poses le coupon sur le meuble en le glissant vers le gars assis. Tu souris. Tu te forces à sourire. Ça se voit. Tu le sais que ça se voit.

T’en as rien à foutre.

- Oh ne vous inquiétez pas ! Je ne suis pas venu pour les leçons de ce matin. D’ailleurs, vous devriez peut-être utiliser les réseaux sociaux pour prévenir plus facilement, si vous avez peur. Tu reprends ton souffle, semblant faire un effort considérable. Je suis venu vous rendre ce coupon promotionnel que n.. j’ai eu la dernière fois.

Tu sors de ton autre poche ton portefeuille, au cas où on te demande ta carte d’identité pour prouver que ce n’est pas un vol ou quoi que ce soit d’autres. Tu en profites pour arranger les idées dans ta tête. Ça serait quand même con de bafouiller.

- Je n’en ai plus l’utilité. Je me suis dis que quelqu’un pourrait être chanceux et avoir un coupon « gagnant » si vous refaites cette offre.

T’es là, devant ce mec derrière son bureau, le fameux papier entre vous. Tu le connais. Tu essayes de te rappeler son nom. Boland ? Bohan ? Faullan ? Non… Nohan ! C’est bon, tu t’en souviens. Enfin… Possible.

Ça se voit, ça émane de lui comme une aura tangible. Ce gars est accro aux chevaux. Ça se sent. C’est bien. C’est une bonne chose pour ces braves bêtes. Toujours exploité, parfois mangé, souvent mal traité, si peu aimé. Et je parle d’un amour sincère envers ces animaux. Pour en prendre soin. Tu as toujours été proche des animaux, pas forcément des chevaux en particulier certes, mais tu éprouves un amour inconsidérable pour les bêtes. Tu repenses à Billy, ton chien. Quelle adorable créature… C’était vraiment un merveilleux compagnon de route. Il est parti beaucoup trop tôt. Comme tous les meilleurs.
Enfin bref, tu te reconcentres sur la discussion avec ton interlocuteur.

- C’est pas forcément les chevaux le problème… Tu inspires puis expires assez fort, comme pour te donner de la force de sortir ces maux mots. … Mais plus le côté « balade en amoureux »

Ça te surprend. Le gars a accepté ton coupon dans un état plus que déplorable. Ce mec est trop gentil. En espérant que certains clients ne l’arnaquent pas. Il a une tête de type qu’on arnaque facilement.

Tu y penses. Est-ce qu’il pourrait chercher quelqu’un pour bosser ? T’as jamais bossé en écurie. Tu as testé tellement de chose, mais pas ça. Pourquoi pas ? C’est peut-être ça ta voie ?

- Dites, est-ce que vous…Tu t’arrêtes. Soit pas débile. C’est super loin de chez toi. Vous allez donner ce coupon à quelqu’un ou le jeter ? Je suis désolé, il est dans un état plutôt misérable.

Toutefois, cette écurie t’intrigue, et plus particulièrement ce gars. Comment ça se fait qu’un homme qui s’intéresse autant au chevaux, accepte de travailler dans une écurie en plein centre-ville ? Certes les Clématis ce n’est pas les CDC mais quand même.

- Votre nom c’est Nohan je crois non ? Dites, pourquoi vous n’êtes pas en pleine campagne à vous occuper d’un ranch, plutôt qu’en centre-ville ?

Aujourd’hui, tu as le temps. Oh, attends…. Tu as toujours le temps maintenant. Pour l’instant en tout cas. Tu cherches activement ta voie, et tu comptes bien trouver. Tu ne désespères pas. Tu ne désespères jamais. Donc tu t’attardes ici, discutant plutôt tranquillement avec ce grand homme. Il a l’air vraiment sympathique. En effet, il a compris ton initiative et va effectivement en faire profiter quelqu’un ; en-tout-cas, c’est ce qu’il t’a dit. Tant mieux. Tu n’aimes pas trop le gâchis.

Évidemment, tu te sens un peu conne lorsqu’il te corrige son nom. Putain, mais oui, Rohan pas Nohan. Abrutie. Donc tu rougis un peu en réalisant ta bêtise.

- Excusez-moi pour votre nom ! J’ai la mémoire qui pêche par moment. Tu réfléchis un instant en fouillant dans tous les petits tiroirs de tes connaissances. Oh Buttercup Bay, j’y suis allé une fois. C’est très joli. Qu’est-ce qui vous a poussé à vouloir changer d’air ? Vous n’en pouvez plus de ce soleil incessant et de cette mer à perte de vue ? Tu glousse un peu à ta propre blague.

En même temps, faut voir la différence entre les deux climats. Alors, certes, oui d’accord, les Clématis ce n’est pas le truc le plus pouilleux du monde avec du béton à perte de vue. Mais quand même, ça reste assez loin de l’idylle de Buttercup Bay. Tu y étais allé quand tu étais petite, en vacances chez mamie. Tu n’en as plus grand souvenir, mais tu te rappelles juste que c’était bien.

Tu t’accoudes au comptoir, tu as envie de discuter aujourd’hui. Tu es de bonne humeur et tant que tu ne gène pas ce bon monsieur alors autant prendre le temps d’apprendre à connaître les gens qu’on côtoie ! Et puis, au vu du bordel sur le bureau derrière le comptoir, il ne passait pas un début de journée amusant non plus.

- Et alors, dites moi Rohan. Depuis quand êtes vous plongé dans cette formidable aventure qu’est l’élevage équestre ?

C’est quand tu vois ce fameux Rohan deposer son stylo et s’extraire à ses tâches administrative en cours que tu es sûre d’avoir eu raison en pensant qu’il souhaitait abandonner tout ça. C’est amusant de le voir passer à autre chose et entrer pleinement dans la conversation avec toi. Après tout, c’est toujours intéressant d’apprendre à connaître les gens. Parfois, même, cela peut aider personnellement.

Alors, accoudée au bureau, tu l’écoutes en buvant chacune de ses paroles et en prenant soin de ne pas l’interrompre. Toutefois, tu es quand même surprise qu’il parle de devenir rouge au soleil, il a la peau relativement bien bronzée de base et à ta connaissance, les peaux mattes ne rougissent que très peu voire pas du tout. À moins qu’il ait un problème de santé particulier et dans ce cas, c’est tout à fait compréhensible !

En-tout-cas, sa passion pour les chevaux se ressent dans chacune de ses paroles dès qu’il évoque le sujet et c’est réellement fascinant de voir quelqu’un autant ancré dans quelque chose. Tu ne peux, évidemment, pas t’empêcher de le jalouser un tant soit peu. Toi aussi, tu aimerais te plonger corps et âme dans une activité quelle qu’elle soit.

D’ailleurs, il aura fallu une question de sa part pour te ramener à toi. Tu étais tellement perdue dans tes pensées à refaire chaque petit chose un tant soit peu sympathique que tu as fait dans ta vie et à l’imaginer en réelle passion. Rien de convaincant à vrai dire.

-Oh non pas du tout ! J’habite aux Octants dans une charmante petite maison. J’aime bien le quartier, il est confortable.  Et toutes divinités qui existent, savent que tu aimes le confort. Même si la maison aurait dû être pour deux personnes… voire plus… [cololor=#9543DB]Et vous ? Vous habitez avec les chevaux ?[/color] Dis-tu en riant un peu. « Est-il un passionné ou un fétichiste » t’amuses-tu à penser.

Mais, malgré tout cela, il y a une question qui te taraude. C’était lui que tu as vu la dernière fois, c’est encore lui aujourd’hui. Est-il propriétaire et seul ou c’est le hasard le plus total ?

- Tout ça est donc à vous ? Et beh. Impressionnant tout de même! Pleine de curiosité, tu guettes un peu ce qu’il y a dernière pour essayer de determiner l’envergure de la batisse.  Dites moi, est-ce que vous organisez des visites des écuries ? Ça m’intéressai de comprendre pourquoi et comment une écurie arrive à vivre en plein centre-ville.