La bandoulière de son sac de sport à l'épaule, Milan descend à l'arrêt de bus au coin de Hudson avenue et Manvers street, puis marche une dizaine de minutes jusqu'à sa destination. Il s'agit d'un petit gym un peu crado, équipements de muscu surtout et un coin pour la boxe et arts martiaux. Tapis matelassés, punching balls, ce genre de trucs. Milan avait l'habitude de courir pour garder la forme, et surtout pour chasser ses idées noires, ses souvenirs et sa rage qui l'ankylosent.
Mais avec sa nouvelle « capacité », c'est devenu difficile.
Il manque de contrôle sur elle. Et courir à un vitesse régulière demande non seulement un état de concentration qui lui est désagréable, mais ce n'est plus aussi épuisant qu'avant. Il a dû trouver autre chose. Pousser de la fonte, s'entraîner sur des machines, ça nécessite un autre type de force et d'énergie, c'est moins risqué. Alors il a trouvé ce petit établissement dans les cdc. Pas trop fréquenté, pas très cher, qui ne nécessite pas d'abonnement si on paie cash. Et les horaires conviennent aux types (et aux meufs) nocturnes comme lui.
Il pensa à Fray. Il serait sûrement content, de le savoir hors de chez lui. Milan sort son vieux téléphone de sa poche, se tourne dos au gym pour qu'on voie bien le nom, puis ouvre la caméra.
wanna fight ? 20h07
Et il regrette aussitôt.
Il inspire profondément et passe sa main le long de son visage en expirant l'air bruyamment. Ça passe ou ça casse. Le téléphone remis en poche, il entre dans l'établissement et reprend sa routine.
boomer de mon coeur
cdc▵ 20h13 ▵ milanla notification sur ton portable te fait bien rire. en tous cas, elle te fait sourire, amusé, presque narquois. milan, alors. sorti de chez lui, tiens. à cheval sur ta moto à l'arrêt, tu lui réponds rapidement. tu es éclairé faiblement par un lampadaire en fin de vie, il n'y a pas un chat dans la rue où tu te trouves : tu es dans ton élément, le seul félin régnant sur les chiens de chasse. tu n'es pas peu fier de toi ce soir-là, en fait tu te sens d'humeur à conquérir le monde.
et cela passe par un tabassage en règle de l'homme qui t'envoie un sms présentement. il se défile, peut-être, tu ne sais pas. mais tu le tiens déjà entre tes griffes. tes yeux ont une lueur dorée amusée au creux de tes pupilles. gonna beat the shit out of u tu lui envoies rapidement. here in 10, tu ajoutes, avant de ranger ton portable dans ta veste, d'enfiler ton casque et de démarrer le moteur. tu connais la ville comme ta poche, et lorsque tu dis que tu seras là dans dix minutes, tu ne rigoles pas.
tu débarques devant la salle de sport dans un soulèvement de graviers et de poussière, et tu te gares en quelques secondes. en passant les portes d'un pas assuré, tu retires ton casque qui se retrouve coincé sous ton bras. c'est un rencard ? tu lui demandes de but en blanc tout en secouant la tête pour décrocher les boucles noires de ton front. toujours aussi peu subtil. tu lui esquisses un sourire en posant ton casque sur un banc. tu tiens tant que ça à ce que je te plie en deux ? tu es d'humeur taquine, ce soir-là. finalement, tu ajoutes, plus tendrement: c'est cool de te voir hors de chez toi, winter.
Alors qu’il passe le pas de la porte, plein d’assurance, Milan le fixe avec les yeux ronds, la bouche légèrement entrouverte. Décontenancé, c’est comme ça qu’il se sent. C'est pas sa particulière confiance à cet instant précis, ni sa question directe (mais un peu, quand même, puisqu'il n'arrive même pas à formuler une réponse).
C’est comme ça depuis la première fois où Fray Yharnam à toqué à la porte de l'appartement. Il y a ce quelque chose qui a médusé Milan à l'instant même ou son regard a croisé le sien. Et leurs routes ont continuées à se croiser, et l'effet reste le même. Toujours.
Milan ignore ce petit noeud de nervosité au creux de son ventre, tentant de répondre à la fougue de son interlocuteur. Il pourrait presque entrevoir cette flamme vive dans le fond de ses yeux noirs, ce qui lui provoque un sourire qu'il peine à réprimer.
De reculons, il se dirige lentement vers les tapis matelassés.
Je t'attends.
boomer de mon coeur
cdc▵ 20h13 ▵ milantu es surexcité ; mais ça ne se traduit pas vraiment dans ton langage corporel. en fait, ça ne se traduit pas du tout, nulle part. tu es juste le même. tu es fray yharnam, et pour milan, tu es fray, le livreur de nourriture taciturne et étrangement déterminé à le faire sortir de chez lui et à reprendre goût à la vie. tu es un garçon étrange, sûrement, à ses yeux.
il te fait rire. tu aimes beaucoup son côté maladroit, éternel embarrassé. il n'est pas doué avec les mots, milan. tu trouves ça attachant. j'avais rien à faire. bien sûr que j'allais venir. tu te rapproches de lui calmement, un sourire aux lèvres. il est grand, plus grand que toi -bien que ça ne soit pas très difficile- mais tu en as déjà mis à terre des plus grands, des plus larges, des plus lourds, des plus musclés. tu repenses à dusk qui a mordu la poussière un paquet de fois à cause de toi - et ça a le mérite de t'arracher un sourire.
en fait, tu as continué à marcher jusqu'à te planter devant lui. sans lui laisser le temps de réfléchir, tu as agrippé son poignet et son bras droit et tu t'es pivoté pour le faire passer par dessus ton épaule et le faire tomber par terre. c'était souple, rapide - très rapide, même. ça s'est fait sans le moindre accroc, en fait tu n'es pas certain qu'il ait réalisé quoi que ce soit avant de se retrouver dos au sol. tu lui souris, au dessus de lui. tu tiens toujours son poignet; tu en profites pour faire glisser ta main le long de son bras et entremêler vos doigts. pas besoin d'entraînement, winter. je te défonce sans échauffement.
que… ?
C’est à peine s’il a le temps de comprendre que ses pieds ont quitté le sol, qu’il y retombe de tout son long. Le choc n’est ni brutal, ni douloureux, simplement surprenant. Milan avait « vaguement » remarqué la musculature de Fray, malgré sa silhouette plus fine que la sienne. Et ce n’est pas qu’il le sous-estimait, mais alors qu’il s'était dirigé vers lui, il n’avait pas monté sa garde une seule seconde.
C’est une remarque spontanée, idiote. Il aurait envie d’en rire s’il n’était pas aussi embarrassé par sa propre maladresse. Ses joues prennent une teinte rosée, encore, effet de cette soudaine proximité.
ressaisis-toi.
Il soulève son bras libre pour glisser sa main sur sa nuque, s’arrêtant à la limite de sa chevelure noire. Fray sourit. Et Milan, il évite son regard, il pourrait s'y perdre. Il préfère le fuir en fixant d’autres parcelles de lui ; le trait parfaitement droit de sa mâchoire, la disposition de ses boucles retombant sur le côté de son visage.
Ses doigts se glissent entre les siens, et la scène lui devient soudainement familière. Comme un déjà-vu, une sensation qui cherche à revenir et qu’il réprime violemment. Le rythme des battements de son cœur s’accélère, jusqu’à tambouriner dans ses oreilles. Il ne sait plus si ce sont les souvenirs ou la réalité qui provoquent cette réaction.
Peut-être un peu des deux.
La main qui était posée sur sa nuque redescend au niveau du torse pour le repousser alors qu’il déstabilise son emprise, inversant le rapport de force. À genoux au-dessus de Fray, le point levé au-dessus de son visage l’espace d’un instant, mais qu’il laisse retomber à côté de sa tête pour s’appuyer au sol. Il tente de ne pas laisser paraître son trouble sur son visage, mais on peut sûrement le percevoir dans ses yeux.
boomer de mon coeur
cdc▵ 20h13 ▵ milanc'est à ton tour de te retrouver par terre, et tu l'observes - peu surpris et surtout souriant. ouais, ouais, tu le charries, réfléchissant déjà à comment te dégager. il est à genoux au dessus de toi, mais pas assis sur toi, ce qui te laisse une chance de...
tu files entre ses jambes, à la frontière entre félin et serpent. il ne t'aura pas si facilement, et tu n'abandonnes jamais. redressé ainsi, tu t'étoiles de quelques pas. j'abandonne pas l'idée d'aller grailler ensuite, cela dit.
tu as attendu qu'il se redresse, et a plongé sur lui pour lui donner un coup - une vulgaire tape, tu avais actuellement peur de le blesser. ce n'était pas comme avec dusk, où tu frappais pour de bon. là, c'était de l'entraînement. du jeu. rien de plus. tu frappes au niveau de son ventre, trop rapide pour qu'il puisse réellement te stopper. le pauvre. tu as dû le plier en deux. enfin, si tu as encore de l'appétit. tu es proche de lui, très proche. ton poing est encore contre son ventre. est-ce que celui qui gagne paie pour l'autre ? tu lui intimes, joueur. tu es définitivement d'excellente humeur.
Sa petite faufilade le fait sourire. Fray est agile, il doit bien le reconnaître.
Fray revient à la charge rapidement, et Milan encaisse quelques coups, dont celui au niveau de l'abdomen un peu plus brutal que les autres, lui coupant presque le souffle.
Prenant un peu d'assurance, l'ex-soldat se met à rendre les coups — rien de trop bourru, ça reste un entraînement amical après tout. Au vu de l'énergie dégagée par le brun, Milan opte pour une stratégie plus défensive qu'offensive, évitant et bloquant au mieux les coups de son adversaire. La pression ressentie un peu plus tôt finit bientôt par redescendre, et dès ce moment, Milan se sent bien.
Vraiment bien.
Il n'est toujours pas sûr de comprendre pourquoi Fray a répondu à son invitation. Milan, cet idiot, il interprète mal les signes, il ne comprend pas vraiment ses intentions, et il interprète même mal ses propres sentiments.
Ce qui est sûr, par contre, c'est qu'il est content qu'il soit là.
Dans un enchaînement de mouvements rapides, il entreprend de le faire reculer jusqu'au mur, lui attrapant les poignets avec fermeté, mais aucune violence. Milan n'est pas très compétitif, et il ne cherchera certainement pas à gagner à tout prix. Mais ce petit jeu, avec Fray, ça lui plait.
Il se penche vers lui à son tour, un sourire aux lèvres, mais le regard tendre.
boomer de mon coeur
cdc▵ 20h13 ▵ milantu t'amuses à te battre contre un homme qui sait ce qu'il fait. c'est ce qui te rassure. si des types comme dusk savaient se battre, milan est dans une autre catégorie. tu n'oublies pas que ça a été son métier, de se battre, même si ça te débectes. tu sais la différence entre ton travail ingrat où il faut invariablement se salir les mains, et vendre son âme à l'armée. mais tu n'es pas implacable pour autant. et tu apprécies milan. tu l'apprécies beaucoup.
c'est satisfaisant de voir milan bloquer chacun de tes coups, répliquer, changer de stratégie, d'approche. c'est satisfaisant de pouvoir lire dans ses mouvements et de savoir qu'il fait de même pour toi. ça t'arrache un sourire.
quand il te met en difficulté et finit par te bloquer contre le mur, tu choisis de ne pas répliquer. pendant un instant, même, tu sens tes joues te chauffer terriblement et tu perds de ta contenance, te contentant d'observer ailleurs, un rire amusé et embarrassé ponctuant tes lèvres. ouais. tu capitules, décide d'arrêter de jouer. mais ce n'est que partie remise. tu plantes finalement ton regard dans le sien, une lueur intéressée au fond de tes yeux. je paie. tu conclus, avant de te redresser pour venir te rapprocher de lui... et venir embrasser sa joue, taquin. tu sais à peu près dans quel état d'esprit est milan vis-à-vis de toi. tu avais décidé de lui laisser le temps, d'ailleurs. tu n'étais pas pressé. et c'était drôle à voir. tu pouvais voir, actuellement, les rouages tourner et chauffer dans son crâne. tu en profites pour lui faire perdre l'équilibre et briser sa poigne sur tes poignets, le faisant basculer et tomber par terre - à nouveau. d'en haut, tu le contemples et ris. même si bon. j'ai gagné, en soit... mais c'est ma tournée.
Milan tombe maladroitement au sol, décontenancé. Il touche du bout de ses doigts là où Fray a posé ses lèvres, et ses oreilles devinrent subitement brûlantes, d’un rouge écarlate. En se redressant, il fait mine de défroisser ses vêtements tout en gardant la tête basse, posant son regard partout où Fray n’est pas.
Après avoir piétiné sur place pendant un instant, cherchant ses mots, il marmonne :
Il revient vers le brun en trottinant, un sourire gêné aux lèvres.