Bien sûr que c'est un jeu.

Tout ne serait qu'un jeu avec toi. Un jeu où tu gagnerais systématiquement où personne ne sait qu'il joue, ni qu'il perd quand ils sont avec toi. Ainsi la question se pose naturellement.

Serais-tu prête à faire échec et mat pour les beaux yeux d'Ofelia?

Ce sont les bras croisés sur la poitrine, adossée au mur de l'immeuble que tu réfléchis. En voilà une question pertinente. Dilemme au goût de défis, tu te dis que ça ne serait que face à l’adversité que tu saurais dévoiler tes intentions les plus pures. Alors quand elle te désigne une porte, la numéro deux pour être tout à fait exacte, tu te redresses, les yeux pétillants. Que cela ne soit qu’un simple coup de chance ou que tu sois en face d’une experte tu te sens de nouveau charmée et te rapproches d’elle en applaudissant lentement.

Bravo.

Clappements rythmés et déhanchés félins, tu te places dos à la porte et l’ouvres sans le moindre effort.

Ce n’est ni chez toi, ni chez elle, ni chez aucune autre personne que tu ne connais d’Adam et d’Eve. Il ne s'agit là que de l'’appartement d’un parfait inconnu, offert sur un plateau par un destin malicieux. Il ne t'aura fallu qu'un simple coup d'œil de curiosité, alors que cet homme, trop pressé par le temps, en oubliera de fermer la porte de chez lui. Alors, tu fais signe à Ofelia d'entrer. Après-toi.  et tout semble n'être qu'un piège grossier de film moisi et pourtant, tel est bien le plan pour l'après-midi.

Squatter chez quelqu’un.

Vous rentrez, ou tout du moins tu rentres, commençant à fouiner l’appartement. Du vieux courrier ici de là, à l’entrée, que tu regardes avec désintérêt. Mr. Johan Delago. Un haussement d’épaules et tu reposes le tout laissant glisser l'un de tes doigts sur un meuble.

Vue la gueule du type je m'attendais à ce que ce soit un peu plus dégueu, mais c'pas trop mal ici. Tu te laisses guider par ta curiosité, lorgnant le salon, puis la cuisine. Si t'as un truc qui te fait envie surtout te gêne pas. C'est la maison qui offre. Laisses-tu échapper, le tout accompagné d'un rire mauvais avant d'aller te servir dans les placards pour y trouver un paquet de gâteaux neuf.

Tu croques dans l'un des gâteaux. Pas terrible. Il faut dire que dans cette zone, ce ne sont pas les meilleures appart qui trainent, mais quand il te manque un truc dans ta chambre étudiante, t'es bien contente de pouvoir compter sur la négligence du quartier pour remplir tes placards.

Du coin de l'œil tu observes Ofelia. Elle ne semble pas plus gênée que ça et se prend au jeu, fouinant tiroirs et frigo à la recherche de son bonheur. Tu souris, d'une certaine façon attendrie et elle te propose du vin. Machinalement tu te rapproches, te glisses devant elle, balançant le paquet de gâteaux sur le canapé du "salon".


Une préférence pour le rouge.  Tu mets la main sur la bouteille, regarde l'étiquette et grimaces un peu. Même toi tu sais que ce n'est pas excellant. La prochaine fois on ira squatter chez quelqu'un qui habite aux Clématis. Osée de ta part de penser qu'il y aurait une prochaine fois, mais en redressant ton regard vers la jeune femme, tu cherches a imposer l'idée dans son esprit, scellant le tout d'un sourire malicieux, qui signe la promesse de mille et une merveilles. Tu cherches l'ouvre bouteille, sans te soucier des verres. Car vous boirez ce vin au goulot comme des mal propres.

Tu vis chez tes parents c'est ça ? Ça se passe comme tu veux ?

Tu ne la lâche pas des yeux alors que tu ouvres la bouteille en un "pop" singulier.

Peur qu'on fouine chez toi ? Reprend-tu d'un souffle espiègle. Des choses à cacher peut-être ?  Bouteille en main, tu lui tournes autour, bois une, deux, trois gorgées, et lui tends le vin en passant langue sur tes lèvres. Tu finis par t'éloigner, par rejoindre le canapé du salon. Gestes dansant, doigts qui se tortillent vers la table base pour en faire glisser l'index dans la poussière, tu lui réponds d'un ton monotone.

Non, j'ai une chambre étudiante à la Fac. Tu divagues et finies par choisir de te rapprocher de la seule fenêtre du grand mur du fond qui donne sur une ruelle plus étroite. Ils se portent bien mieux sans moi. Si j'avais pas autre chose à faire je ferais de leur vie un véritable enfer. Tu souris, revenant au beau milieu de l'appart, t'étirant de tout ton long, tel un félin. Tu reviens vers Ofelia, vers la bouteille de vin qu'elle tient à la main et tends les bras pour en avoir encore un peu. Tu es curieuse. Follement curieuse, de bien des choses, mais surtout d'Ofelia.  Ça te parle, les étoiles ? Tu n'y vas pas par quatre chemins, tu imposes le sujet là, comme ça, sans trop réfléchir, sans penser aux conséquences.  Avec tous ce bordel de tremblements de terre, j'ai entendu parlé d'étoiles ou d'êtres du ciel, bref, quelque chose dans le genre, j'voulais juste savoir si ça te disait quelque chose.

Esquive. Ou ignorance. Là, tout de suite, tu n'arrives pas bien à déterminer. Tu es l'une des nombreuses princesses des secrets et des mensonges... et quelque chose te dit qu'Ofelia pourrait bien être l'une d'entre elles, juste d'un autre royaume... lointain... T'as envie de croire que t'as encore les pieds sur terre, qu'aucune étoile n'est venue te donner des ailes...contrairement à Sen qui s'est envolé Ether sait où.

Ce besoin d'être là.
De sauver ou d'être sauvé.
? ? ?
Qu'est ce que tu cherches vraiment Leto ?

Lèvres contre goulot, vin acre dans la gorge, tu soupires, lasses.  

Il faut quoi? Que je donne encore de ma personne pour qu'on me dise des trucs?

Puis un bruit. Fin, distordu dans tes oreilles. Tu crois d'abord aux tintements d'une cloche, si familière, si renard, mais finalement ce n'est que le bruit d'un trousseau de clé...
d'un trousseau de clé.
( des clés)

Tu lâches la bouteille et viens attraper la main d'Ofélia, lui intimant en quelques gestes de ne pas faire trop de bruit. Visiblement le proprio de l'appart est rentré plus tôt que prévu. Toi qui pensais qu'au vue du retard pris dans la mâtiné, il en aurait pour la soirée.... ( a moins qu'il ne se soit fait viré (a) )

Au pas de courses vous vous retrouvés dans la chambre. Mal rangée... tu peux dire sans te tromper que la pièce n'a pas été aéré depuis un moment.

Cliquetis.
Verrou qui tourne.
Tic.

Et toi, Leto, mains sur la fenêtre que tu ouvres en grand, y passes ta tête, le cœur en vadrouille. En contre bas un ridicule balcon d'un mètre sur deux.

Le gout du risque est un de tes parfums préféré.

Pas le choix.

Je saute en première, j'te rattrape, ok ? On a qu'a dire qu'on s'entraine quand je te délivrerais de chez tes parents.

Il y a eu cette vague d'agression qui t'a faits doucement sourire. Rictus accentué par le vin, tu lui avais jeté un regard qui en disait long. Ô Ofelia, si vorace, si mordante, lionne sur la défensive. Comment croire qu'elle ne cache rien. Tu n'irais pas jusqu'à dire que la jeune femme est un livre ouvert mais il faut croire que tu as soudainement eu accès à l'un de ses derniers chapitres.

Mais le temps te manque.

Tic
Tac.

Le temps te manque toujours.
Un bruit de clés et vous détalez.

Deuxième étage, tu passes une jambe par la fenêtre, te laisses glisser le long du mur, mains en crocher sur le rebord. Tu te laisses tomber. Tu atterris dans un "humpf" étouffé et tu jettes un rapide coup d'œil dans l'appartement du bas.  Par chance, il n'y a personne. Ok. Tu redresses les yeux, recules un peu, lui fais des signes, larges et amples, manière de dire "Regarde moi"

Viens.  

Tu es étrangement calme.

Laisse-toi glisser.  

C'est qu'il vous reste encore un étage à descendre. Tu jettes un rapide coup d'œil vers le bas. Une rangée de buissons vous attend patiemment, ainsi qu'un toit de voiture, si vraiment vous vous loupez.

Elle est quand même sacrement belle.

Une pensée vagabonde dans cet instant de stresse, alors que ton cœur se refuse à céder à une quelconque forme de panique. Ofélia se penche au balcon, s'assure que tu es toujours là. Dans l'absolu, poussé par ces légers sentiments que tu éprouves pour elle, tu lui fais cadeau d'un sourire. Je suis là Lui assures-tu sur un air de dire "Je serais toujours là"  sans même réfléchir aux conséquences, au fait que demain la mort elle même pourrait bien te frapper.

Elle te tombe dans les bras.

Jusqu'à tout récemment, tu étais restée en contrôle. Mais avec cette escapade improvisée, ces ridicules moments de rire, de stresse et d'aboiement ont comme précipités ce rien du tout d'affection dans sa chute. Et a se retrouver ainsi, toutes les deux si proche, souffle à souffle, tu te sens le cœur en détresse. Il saute, rate un de ses battements, te coupe la chique. Tu ris. Elle rit. Vous êtes un peu bêtes, mais les beuglements offusqués de votre "hôte" grondent et comme rester là a batifoler te parait de nature à rajouter du risque au risque, tu te ressaisit.

• • •

Vous vous êtes échappés de la plus vil des manières, aux pas de courses ! Deux voleuses qui n'ont rien voler de plus que du bon temps. C'est loin de cet appart miteux et de ce vin infecte que tu ris de tout ton soûl, reprenant doucement ce souffle perdu.

Haha. De rien. Attend toi à ce que je recommence.

|hrp: the end |