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tondeuse & rosiers. (ofelia)
tondeuse & rosiers
Urgent, elle avait dit. Tu ne comptais pourtant pas bosser, cette nuit, tu manquais de sommeil depuis un certain temps, tu voulais pouvoir récupérer, juste parce que Rose te semblait particulièrement agitée, ces derniers temps. Le ton qu'elle prenait pour s'adresser à toi s'était fait plus rude, depuis que tu avais, un beau matin, trouvé Selkie au bord du lac, depuis cette absence étrange dont tu avais été victime … la petite fille semblait en colère, mais impossible de savoir pourquoi. Et puis l'hiver s'annonçait difficile, il avait fallu que tu répares l'abri à bois qui avait cédé sous la force du vent en fin de semaine dernière. Tu ne voulais pas que le bois sec et prêt à être brûlé dans la cheminée de la maison ne prenne l'humidité, c'aurait été catastrophique.
Cependant, la pauvre dame qui t'avais appelée semblait en détresse, elle se disait victime de son mari, décédé l'an dernier. Comme elle te l'avais expliqué, le pauvre homme avait été foudroyé d'une crise cardiaque alors qu'il était sur la tondeuse … aucune chance qu'il s'en sorte. L'incident avait emporté avec lui les rosiers auxquels il tenait tant, la tondeuse avait en effet continuer sa course jusqu'à les taillader pour finalement rentrer dans le mur de la maison. Selon elle, depuis ce jour, il était là, errant entre la tondeuse, rangée depuis un an dans l'abri de jardin, et l'endroit où ses rosiers étaient plantés, avant. Une bien triste histoire, et pourtant, elle avait cru bon d'ajouter que son mari n'avait toujours été qu'un sale con et qu'elle voulait à tout prix qu'il débarrasse le plancher une bonne fois pour toute.
C'est comme ça, donc, que tu t'es retrouvé là, assis dans l'herbe humide, dans la pénombre de la nuit, tu as installé tes appareils de façon stratégique et tu as déposé une planche ouija sur les pieds de rosiers coupés à ras, et totalement desséchés.
Re: tondeuse & rosiers. (ofelia)
Tondeuse & Rosiers
La main qui tremble. La paume qui s’illumine. La coupure qui cicatrise rapidement. Qui ne laisse aucune trace. Et puis un tapotement sur l’écran de ton téléphone. Tu n’as pas battu ton record cette fois-ci. À quelques secondes près c’était bon. À quelques secondes près on aurait pu appeler ça du progrès. Quand, en ce moment, on dirait plus que c’est tout l’inverse. S'entraîner pour réagir plus vite. S'entraîner pour ressentir une fatigue moindre. Surtout, s’entraîner pour la curiosité, pour pousser tes limites, pour voir jusqu’où tu peux aller. Et quand même haïr ce pouvoir, cette malédiction.
Soudain, un boucan qui te semble venu des enfers. Un boucan qui vient du jardin de la voisine. Bon sang qu’elle t’agace cette vieille chouette. Ne peut-on plus faire des expériences en paix ? Dans quel monde vit-on ? Tu l’aurais tout bonnement ignoré si ce n’était pas pour Willem qui débarque dans ta chambre comme un cheveu sur la soupe. Il ne frappe pas. Ne prévient pas. Et dans un réflexe soudain, ta main se ferme pour y emprisonner la lumière. Grimace d’agacement, soupir las, grognement irrité. Tous les signes de l’irritation. Il veut que tu ailles voir ce qu’il se passe. Il te l’ordonne même. Parce que tu comprends, on doit bien ça à cette bonne vieille Madame Hansen. Elle si gentille qui te gardait quand tu étais plus jeune et t’offrait toujours des chocolats à Noël. Ouais. Des chocolats à la liqueur, tu parles d’un cadeau.
C’est comme ça que tu te retrouves dehors, en pleine nuit, dans le froid de Novembre à cogner à la porte de la voisine. Tout ça pour qu’elle t’apprenne qu’un chasseur de fantômes tente de faire partir son mari décédé de son jardin. Allons bon. Tu aurais pu juste lui donner une améthyste et on n’en parlait plus. Mais non. La vieille chouette en fait toujours plus. Toujours trop. Tu crois en beaucoup de choses. Les esprits ? Tu n’en sais rien. Après tout, il y a bien des étoiles sur Terre. Curieuse tout de même, tu demandes à le voir, ce fameux chasseur. Tu te diriges promptement dans le jardin. Là, au milieu de la pelouse, un homme. « Ce vacarme c’est qu’il y a quelqu’un ou que vos appareils sont pétés ? » Demandes-tu en t’approchant nonchalamment de l’un d’eux. Tu n’y touches pas. Mais tu ne cherches pas non plus à savoir si tu as le droit d’être ici, dans le jardin, au milieu de ses engins. « Ah oui… Les rosiers… » Tu les pointes du doigt en apercevant une planche de bois dessus. Tu ne discernes pas vraiment que c’est une table de Ouija. « Sombre histoire. » Les funérailles de ce pauvre homme n’étaient qu’un concours du plus faux-cul du quartier. Son épouse à remporter la palme.