Elle rit de sa propre anecdote, la main droite placée devant sa bouche, avant de reprendre un air sérieux, voire triste. Sous ses immenses lunettes teintées, et bien camouflé par son maquillage, Veronica a les traits tirés. L'effet de l'insomnie, l'effet gueule-de-bois, mais cela va même au delà de toutes les formes de fatigue qu'elle ait connu. Elle se rend bien compte qu'il ne suffira pas de vacances-méditation-massage-et-facial pour lui redonner la pêche.
Chaque retour lui prend un peu plus de son essence. Qu'adviendra-t-il lorsqu'il ne lui restera plus aucune énergie vitale dans laquelle puiser?
Une grande inspiration suivie d'une longue expiration, elle redresse les épaules avant de repositionner le bouquet de tulipes roses sur l'imposant monument funéraire - digne d'une membre de la famille Montgomery.
Veronica tourne les talons et marche quelques minutes sur le petit chemin pierreux pour se rendre dans un autre coin du cimetière. Sa quatrième et dernière visite.
Sa main retient le rebord de sa robe courte ajustée alors qu'elle s'assied sur le sol - c'est encore un peu terreux mais le gazon a bien commencé à pousser -, le dos appuyé contre la pierre froide. À sa gauche, elle pose le bouquet de tulipes blanches, puis croise les bras en prenant appui sur son petit sac à main.
L'attention se porte vers une berline, stationnée sur le côté de la route menant au cimetière, partiellement cachée derrière les arbres en haut de la colline. La voiture n'y était pas à son arrivée, mais impossible de dire combien de temps s'est passé depuis. La main se glisse dans l'ouverture du petit sac noir pour y trouver le tout pistolet qui y est caché, observant nerveusement les alentours à la recherche du ou des nouveaux visiteurs. Réaction exagérée, peut-être. Du moins elle l'espère.
Et puis, il prend la parole.
* Mademoiselle Bellandi.
Au moins, il est poli, il t'a salué : c'est déjà ça.
* J'ai un contrat sur votre tête.
C'est bien moins poli, mais Nicky, tu commences à être désabusée.
* Cependant, je ne vais pas le mener à terme. Il y a un petit silence, pendant lequel il reste impassible; il a relevé les yeux de la pierre tombale et observe l'horizon. Il n'y a personne dans le cimetière. Vous êtes la... protégée de quelqu'un qui m'est cher.
Il se tourne vers toi, saisit ton bras, et dépose une clé usb dans ta main. Noire, non étiquetée.
* Portez ceci à Nori Wallace. Il saura que c'est moi.
...
Il s'approche, sans hésitation ni détour. Veronica se relève, la main gauche fermement (et douloureusement) crispée sur la ganse perlée de son sac à main, le fusil tenu dans la main droite.
Peut-être est-ce l’instinct, peut-être que ce sont les traits familiers, ou simplement la peur, mais son bras ne quitte pas le long du corps. Il semble la connaître, mais ce n’est pas réciproque. Mais Veronica commence à avoir l’habitude que la balance des informations ne soit jamais en sa faveur.
Tu sens sûrement la résistance de son bras quand tu l’agrippe. Toujours en silence, la jeune femme fixe le petit objet posé au creux de sa main avec un air perplexe, puis dévisage l’inconnu.
Veronica range le petit objet dans une petite pochette à l’intérieur de son sac, et l’arme avec. Elle n'est pas très rassurée (mais pas tellement surprise, non plus) de savoir qu'il y a un contrat sur sa tête, mais si il avait eu l'intention de la tuer, ce serait déjà fait.
* C'est une clé u... ah. Il toussote, embarrassé. Ce sont des informations pour Nori Wallace - et seulement lui. Un regard appuyé, plein de remontrances presque prophétiques. Je vous la confie. Elles seront importantes pour votre... cercle.
...
Elle fronce les sourcils, passant instantanément de la méfiance à la perplexité. Qui est cet homme? Il est au courant pour Sirius? Et pour elle, les autres? Est-il une étoile lui-même, ou un lié? Les questions fusent de part et d'autre de sa tête, il semble être à la fois ennemi et allié.
C'était mal la connaître de lui confier ainsi des informations secrètes. Veronica n'hésiterait jamais à mettre son nez là où elle n'a pas à faire... et encore plus lorsque cela la concerne - directement ou non. Au regard qu'il lui porte, il semble déjà se douter du risque de lui confier cet objet, mais elle reste impassible. Mais au fond, une curiosité malsaine commence à la ronger. Si elle la remet à Nori de manière honnête, obtiendra-t-elle ne serait-ce qu'un fragment d'information? Elle en doute...
* Je suis le frère de Nori.
Ca te frappe soudain; c'est vrai qu'ils sont très semblables, finalement. Mais Nori ne t'avait jamais parlé d'une quelconque famille - sinon Danaé, évidemment... comment aurais-tu pu oublier, hein.
* J'essaie simplement de vous aider.
...
Le frère de Nori. Voilà, voilà pourquoi il lui était si familier. Mais il lui semble que cela crée plus de questions que de réponses, au final.
Ce n'est pas qu'elle remette en doute ses propos, mais son rôle dans toute cette situation reste si floue, comme un épais brouillard qui ne cesse de s'épaissir.
Il lui semble que c'est la mauvaise question, mais elle a du mal à réfléchir clairement. Veronica a devant elle une personne qui sait, une personne autre que Nori, Sirius, ou le cercle. Est-il aussi au courant pour le cercle de D̷͈̞̗̭̦̾̂a̶͖̥͎͋͘ǹ̴̬̲̻͎̑̕ā̶̻̜͊é̶̫̉̂?
* Il a sûrement dû vous dire, ou pas d'ailleurs, qu'une organisation avait pour but de supprimer les étoiles et leurs liés. Je fais partie de cette organisation, mais...
Silence.
* Ma loyauté va surtout à mon frère, dans une certaine mesure.
...
C'est donc ça.
Veronica se renfrogne soudainement, et observe nerveusement les alentours, cela se voit à peine à travers ses lunettes teintées. Ils sont toujours seuls. Ses doigts se resserrent sur la ganse de son sac, et elle pense à Sirius.
Si Sirius n'avait pas Nori comme hôte, elle serait morte. Et il aurait pourchassé son étoile, comme les autres. Un noeud douloureux se forme au creux de son ventre à cette seule idée. Et elle le déteste soudainement pour ça. Il les aide simplement par défaut.
Elle est sur le point de tourner les talons, de quitter cette conversation. Mais quelque chose la retient, elle se mord fort l'intérieur des joues, comme si elle s'intimait de ne pas parler.
Un éclair de douleur lui traverse la tête, du front à la nuque, juste à mentionner son nom. Un nom qu'elle prononce avec un ton glacial.
* Quoi, Danaé Aoibheann.
Silence.
* Si je vais la tuer ? Je n'en sais rien. Je ne préfèrerai pas, je considère son cercle comme lié à celui de mon frère, en un sens. Mais je joue à un jeu très dangereux, vous comprenez bien.
Il t'observe, pas sûr de s'il doit en dire plus ou pas.
* Nous nous reverrons sûrement, il déclare, avant de tourner les talons.
terminé de mon côté.
Veronica n'aurait jamais pu s'attendre à une rencontre si... cordiale (?), avec un chasseur.
Elle sort la clef usb de son sac alors qu'elle se dirige vers sa voiture.
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