Le cœur qui s’agite, palpite, hurle dans ta poitrine. Et la peur qui te serre le ventre. Le coup de feu qui te tire de cet étrange sommeil. Et la panique sur le visage. Assise dans l’obscurité, tu rassembles tes membres contre toi. Tes jambes contre ton corps. Tes bras autour de celles-ci. Tu n’oses plus bouger. Effrayée. Tu le sens, ton myocarde qui se contracte et s’affole. Ta respiration se fait forte, saccadée. Puis soudain tu entends bouger. « Qui est-là ?! » Tu hurles presque, plaintive. Qu’ils s’en aillent, qu’ils te laissent. Qu’on ne te fasse pas de mal. Ton front qui se pose sur tes genoux et toi, le refus de voir ce qu’il se passe, de voir la réalité. Le refus de comprendre et de chercher des réponses. Paralysée par la peur. Une voix que tu crois familière vient à tes oreilles. Ce n’est pas vrai. Ce n’est pas possible. C’est un cauchemar. « He… Hego… ? » Demandes-tu reniflant ton sanglot paniqué. Tu as peur Charlotte et pourtant tu veux savoir. Si c’est lui, tu veux le voir. Alors tu avances dans sa voix, lentement, mais sûrement. C’est un putain de cauchemar.

Tu titubes, Charlotte. Tes jambes peinent à te porter. Sans doute est-ce dû au stress, à la peur, à cette paralysie qui englobe ton âme. Et pourtant, tu avances, traînant tes pieds autant que faire se peut. Soudain Hego est là. Face à toi. Tu sens ton cœur monter dans ta gorge, les larmes monter à tes yeux. Sans lui demander son avis et sous le coup de l’impulsion tu sautes à son cou, l’enlace, heureuse de le voir et en même temps désespérée. Parce que s’il est là, tu sais ce que ça veut dire. S’il est là c’est que ça concerne les étoiles. Danae est-elle en danger ? Rien qu’à cette pensée ton cœur rate un battement. « Ça va ?? Tu n’as rien ?? » Tu demandes, inquiète, reculant d’un pas ou deux. Tu le dévisages, tente de te faire ton propre avis, de voir un semblant d'égratignure t'indiquant qu’il s’est passé quelque chose, qu’il a lutté. Mais rien.

« Je ne sais pas… » Réponds-tu à cet inconnu. Tu t’en méfies. Tu te méfies de tout. Et puis un second coup de feu. Ta main qui vient chercher la manche d’Hego, qui s’y cramponne pour trouver réconfort et soutien. Tu acquiesces à la proposition qu’il te fait. Bien sûr qu’il faut quitter les lieux et tu ne te feras pas prier pour le faire le plus rapidement possible. « Tu… es sûr que c’est une bonne idée ? Je veux dire, on ne le connait pas Hego… On ne sait pas si on peut lui faire confiance. » Tu murmures sans savoir si tu es vraiment si discrète que ça.

Une grimace étire ton visage Charlotte. Est-ce que tu veux vraiment te mettre ce gars à dos ? Cet homme gigantesque qui, tu en es sûre, d’une gifle pourrait te faire voler. Ce n’est pas vraiment toi d’être hostile face à l’inconnu. Toi, tu aimes tout le monde non ? Tu fais confiance à tout le monde non ? Mais tu t’es refermée sur toi-même ces derniers temps. La peur t’arrache le ventre et cette confiance, tu ne l’offres plus aux premiers venus. Ils pourraient te faire mal, faire du mal à tes proches, ton cercle, ton étoile. Pourtant tu t’en veux. « Désolée… Ce n’est pas ce que je voulais dire. Je ne voulais pas vous blesser. Mais comprenez-moi, vous êtes un inconnu et on se retrouve ici sans savoir comment ni pourquoi. Évidemment je me méfie un peu. » Avoues-tu, mal à l’aise mais sans reproche ni méchanceté dans le ton.

Tu écoutes les arguments de Hego et il faut avouer qu’il n’a pas tort. Sans doute auriez-vous plus de chance de sortir à trois qu’à deux. Et puis, pourrais-tu seulement continuer ta vie en sachant que tu as abandonné quelqu’un dans cet endroit ? Non. Tu passerais ton temps à ressasser, à te morfondre dans tes regrets. Alors tu acquiesces, acceptes cet homme dans votre groupe.

Et puis le vent. Et puis le froid. Glacial. Il te tire un frisson désagréable. Seule source de chaleur, la main de Hego qui vient serrer la tienne et que tu serres en retour. Tu t’y accroches comme à une bouée de sauvetage. L’inquiétude remonte en flèche. Vas-tu seulement réussir à sortir d’ici ? Tu acquiesces à nouveau. Avancer ? Oui sans doute. Tu ne sais pas, tu ne réfléchis plus vraiment pas toi-même, la peur qui te prend les tripes. Et cette obscurité qui rend tout difficile. « Personne n’a rien sur lui ? » Demandes-tu d’une voix faible, fouillant tes poches de ta main libre. Un rectangle dur et froid dans ton manteau. Ton téléphone. 17%. Merde.

Danaé. Danaé. Danaé. Ton esprit te hurle son nom. Ton coeur se serre. La peur, la panique l’emprisonne. La retrouver. Il faut que tu retrouves ton étoile. Hego l’a senti, lui aussi. À deux vous allez réussir à la trouver non ? C’est une obligation. Tu n’as pas le choix. Et même si tu l’avais, ta décision aurait été vite prise. Ta main serre celle de ton partenaire alors que ton regard inquiet se pose sur lui. « Tu l’as sentie aussi… » Tu murmures, non pas pour cacher quoi que ce soit à l’inconnu, c’est devenu le cadet de tes soucis, simplement parce que la peur et le froid te font parler tout bas. Tu acquiesces Charlotte. Il n’y a pas une minute à perdre. Danaé est ta priorité. Alors tu pianotes sur ton téléphone, allumes la lampe. Pourvu que la batterie tienne un minimum. Dans l'agitation, tu n'as même pas pris le temps d'expliquer ce qu'il se passait à cet autre homme. Et tu n'es pas réellement certaine de vouloir qu'il vous suive jusqu'à Danaé.

Le tintement familier tout autant qu’étranger. Et puis cet homme particulier, flottant face à vous, éclairé par la lumière de ton téléphone. Il vous prend de court et son apparition inattendue te coupe presque le souffle. Qui est-ce ? Que vous veut-il ? Est-ce un ennemi ou un allié ? Dois-tu te servir de ton pouvoir au risque de ne plus rien ressentir pendant les prochaines minutes ?

Tes mains crispées sur la manche d’Hego, tu te caches à demi derrière lui. Tu t’accroches à lui comme à une bouée de sauvetage. Oui, c’est ça. Il est ta bouée dans cette mer d’inconnus. Soudain les mots. Soudain le rire. Tes bras qui te tombent le long du corps. Danaé. Vous vous êtes faits avoir. Comment ça ? Par qui ? Pourquoi ? Tu avances d’un pas. « Où… Où est-elle… ? » Demandes-tu la gorge nouée. Deux pas. « Vous avez l’air de le savoir... Non ? » Ou bien il se joue de vous. Trois pas. « S’il vous plaît… »